Faire Chier Zoey, Chapitre 149. ft. Aaron

On était samedi. Les beaux jours commençaient sérieusement à s'installer et tu avais réussi à te garder ce samedi pour toi. Cette matinée. Pour une fois, tu ne travaillais pas et ne devais réellement te lever que pour 17h. Ô, la joie d'une grasse matinée, tu ne connais pas. Mêmes les dimanches habituellement, tu te lèves. La faute au rythme duquel tu es incapable de te détacher. Mais ce matin t'aiderait à faire un peu le tri dans ta vie. Tu t'étais mis en pause ces derniers mois. Après ces histoires avec ton père, après Astrid... Tu avais juste dis stop. Plus rien. Tu ne voulais plus rien savoir. Tu ne sortais plus vraiment, ne voyais plus grand monde. Tu as joué ton solitaire un petit temps pour te ressourcer, et cette journée pour toi serait la dernière que tu passerais ainsi. Alors tu te devais de la savourer, de l'ap-

Un frisson te parcours toute l'échine lorsque tu entends la sonnerie. Allongé dans ton lit, tu espères que quelqu'un va se lever. Mais tu te souviens bien vite que tu es seul dans la maison, ce matin. Entre les rendez-vous de certains, et les autres qui découchent, la maison avait été bien vide dans la nuit. Alors tu te lèves en trainant des pieds, enfile un t-shirt par dessus ton caleçon Tortues Ninjas sur lequel tu as craqué comme un enfant. En descendant les escaliers, tu te frottes les yeux en criant Ouaiiis. J'arrive, j'arrive. Puis derrière cette porte, pendant un petit instant, tu ne comprends pas qui est ce petit oisillon tombé du nid. La jeune fille t'es étrangement familière, certain de l'avoir déjà vue, tu la reconnais mais est encore trop mal réveillé pour y apposer un souvenir clair. Puis tu comprends bien vite lorsqu'elle pend la parole.

Oh ! Maya ! Ca me fait plaisir de te rencontrer enfin ! Euh, non, non Zoey a pas dormi ici cette nuit. Mais viens, entre. Tu lui souris sincèrement, affectueusement, et ouvre la porte en grand en lui laissant la place de venir. De ce que tu savais, Maya était encore au lycée. Une petite fille, tu avais l'impression, bien incapable de comprendre quand on devenait une femme. Alors ton regard avait instinctivement celui d'un père, protecteur et attendrissant. En réalisant, sur le pas de la porte que tu n'es qu'en caleçon, tu tentes de cacher ton entre-jambe d'une de tes mains maladroitement, puis tu toussotes. Hm. Tu peux laisser ses affaires en bas, ou les monter dans sa chambre. Tu es déjà venue ? Tu veux, visiter la maison ? Il n'y a personne ce matin, alors profite !

Elle n’est pas très grande cette Maya, elle a ce côté espiègle que toi tu as perdu depuis bien longtemps. L’œil qui pétille et le regard curieux. Tu la regardes entrer dans la maison, jeter ses yeux dans tous les sens pour découvrir le grand espace et refermes doucement la porte derrière elle. Oula, aucune idée d’où elle est… Peut-être avec… Ouais non, j’en sais rien. Les noms, tu ne les connais pas. Tu as entendu un « Soan » passer, mais est bien incapable de savoir si c’est avec lui que se trouve Zoey, ou si elle est chez une amie surfeuse. Tu n’es pas vraiment du genre à la pister où qu’elle aille bien que tu la considères comme la petite sœur que tu n’as jamais eu, tu la laisses vivre sa vie en essayant de ne pas être le gros lourd de service…

Eh bah, il fallait venir plus tôt ! Tu lui souris le sourcil levé et l’oriente dans la salle principale. Puis vient le tour de la cuisine, les toilettes et l’une des chambres dans laquelle tu n’entres pas pour respecter l’intimité de tout le monde. Petit à petit, tu la guides vers les chambres à l’étage, dont celle de Zoey, puis la tienne. Tu peux poser les affaires de ta sœur dans sa chambre, je vais me changer, je reviens. D’un pas lent pour ne pas paraître trop impoli, tu commences à partir dans ta chambre avant d’être arrêté par une nouvelle question de Maya. Aussi curieuse et directe que sa sœur, ça te fait rire de voir comme elles se ressemblent, certainement sans le savoir.

Tu esquisses alors un petit rictus. Haha… Tu as vécu avec elle plus longtemps que moi, tu sais bien comment elle est ! Mais non, en vrai, elle n’est même pas la pire de la colloc. On s’entend bien nous, en tout cas, et je l’adore donc tout se passe bien ! Oh oui, toi tu n’as pas de souci avec Zoey, tu en as bien plus avec d’autres petits membres de cette colocation, mais la jeune étudiante est sûrement l’un de tes derniers soucis ! Tu fais un petit signe de la main, pointant ta chambre du doigt et file vite te changer. Un pantalon, ce n’est pas du luxe. Tu laisses donc Maya seule dans la chambre de sa sœur l’espace de quelques petites secondes, tout juste.

Chacune des petites remarques de Maya te fait doucement rire. Tu trouves qu’elle a un esprit bien à l’affût de tous les détails qui pourraient l’intéresser. Elle est maline et drôle, elle ressemble beaucoup à Zoey finalement, sans l’impulsivité, du moins pour le moment. Lorsqu’elle te questionne sur le loyer, tu hausses les sourcils et commence à lui répondre tandis que tu pars te changer. Oh, je suis proprio en fait… C’est un héritage de mon père cette maison, donc le loyer est pas super élevé pour LA puisque mon but était que la maison soit vite remplie. Je voulais surtout ne pas me retrouver seul ici… Du coup tout le monde me paye 400$ par mois, tout compris. Pourquoi, tu cherches un endroit où vivre ?

Tu laisses la question en suspens avant de continuer ton chemin et revient quelques minutes plus tard enfin habillé correctement. Dans la chambre de Zoey, tu regardes une poignée de secondes Maya avant de lui faire comprendre que tu es revenu. Elle semble inspecter chaque recoin de la chambre, sûrement très représentative de la grande sœur Whanau. Puis tu finis par te racler la gorge doucement, en souriant. Alors, tu veux quitter le nid ? Tu ne peux pas t’empêcher de faire ces petites remarques qui assimilent tout de suite Maya à un pauvre petit oisillon. Elle est toute jeune et a encore tellement de choses à vivre. Tu en as vécu deux fois plus toi, rien qu’y songer te donne un frisson qui te parcourt l’échine.

Elle me… Bah oui, on s’adore ! Je m’entends vraiment bien avec Zoey, je la considère presque un peu comme ma petite sœur finalement… Je sais pas trop ce que ça fait de toi, haha. Mais… euh… Au départ, tu n’as pas tilté. Tu ne réalises jamais vraiment lorsque des allusions te sont lancées au visage, mais après quelques secondes à parler, tu réalises que Maya sous-entendait peut-être que Zoey lui avait parlé de toi en tant qu’homme et non que grand frère hypothétique. Ce te fait bizarre. Pourquoi tu dis ça, sur ce ton ? Zoey t’a dit quelque chose ? Tu paniquerais presque, l’espace d’une seconde, ce qui a comme effet que lorsque tu souhaites t’adosser sur une étagère dans la chambre, ton dos rate son appui et tu commences à glisser pour finir par tomber sur Maya que tu propulses involontairement sur le lit déjà bien encombré.

Oh, pardon ! J'espère que je t'ai pas fait mal ? Tu lui étais tombé dessus, mais elle n'avait pas vraiment réagi ; donc non, elle ne devait pas avoir eu mal. Tu te relèves vite du lit, n'appréciant pas vraiment de t'asseoir ici, comme i c'était ta chambre, même si ça reste chez toi. Les chambres, c'est le côté privé de la maison, et toi tu détestes quand on s'invite dans la tienne sans prévenir. Une fois debout, tu repenses aux derniers mots prononcés par Maya. Tu n'as jamais vu Zoey autrement que comme quelqu'un à protéger, ça doit être ton instinct paternel, celui qu'on dit qui n'existe pas tant qu'on n'a pas tenu son propre enfant dans ses bras. Et pourtant, toi, tu l'as. Alors oui, les remarques de Maya te font bizarres, douter, soudainement. Est-ce que Zoey, elle, te voit différemment ? Ce serai étonnant. Tu es bien trop vieux pour elle, toi et tes manies presque religieuses, liées à tes valeurs. Puis tu n'es pas son genre, non. Vraiment pas, tu ne l'aurais même jamais été. Ah ouais ? Je pensais pas. Enfin, pas à ce point ! Haha, c'est que je suis un modèle de perfection, tu vois !

Ton sourire est accompagné d'un clin d’œil appuyé, pour que la jeune fille devant toi comprenne bien qu'il ne s'agissait que d'une petite blague. Ce n'est clairement pas ton genre de t'estimer proche de la perfection, tu sais que tu es rempli de défauts, ne serait-ce que cette envie dévorante de tout ranger dans cette chambre en bordel, car tu aimes trop l'ordre et la sérénité. Mais tu n'en fais rien, essaye d'oublier la dernière remarque de Maya à propos de sa sœur et tente même de renchérir sur le sujet précédent. Vous cherchez un appart à deux du coup... Ca doit être sympa de vivre avec son frère, jumeaux en plus ! Vous devez bien vous entendre tous les deux. Tu commences à faire les cents pas dans la chambre, sans trop le remarquer, puis tu ramasses des choses disposées ici et là que tu sais qu'elles devraient se ranger ailleurs. Des assiettes sales que Zoey n'a pas descendu après avoir mangé dans sa chambre, ou un DVD qui va normalement dans le salon.

Hollywood est le plus abordable, oui... Après il y a sûrement de bons deal à Los Feliz. Perso j'aime beaucoup Los Feliz ! Puis tu commences à sortir de la chambre, en oubliant d'abord de l'annoncer à Maya que tu laisses dans la chambre. Euh, tu as fini ? On redescend, non ? Ta tête est apparu soudainement dans l'enchevêtrement de la porte, accompagné d'un petit sourire. Tu es encore mal réveillé, surement. Tu vas faire quoi, à la fac ? Mais pourtant, tu es étonnamment bavard, pour un matin passé avec une inconnue.

Tu écoutes bien tout ce qu'elle te dit. L'appartement, son frère, la couture. Tu plonges les yeux dans les siens, vois son regard changer lorsqu'elle parle de Maël. Ils doivent être te proches, et tu en viendrais presque à être jaloux de ne pas avoir eu la chance d'avoir un frère ou une sœur. Seuls contre le monde, avec ta mère, ça t'allait, mais quelqu'un de ton âge et qui te comprend, ça aurait changé beaucoup de choses. Toujours est-il que bien que tu prêtes attention à ce que Maya peut te dire, tu es resté bloqué sur son autre phrase. Celle d'avant. "Elle en pince pour toi". Mais non, c'est absurde.

Une fois en bas, tu vas chercher deux tasses et les dépose sur la table du salon. Tu prends également le café, qui est rempli et te sers. Tu en veux ? Il n'est pas très fort. Je dois avoir du thé, sinon. P'tet du coca. Pas une seule fois, tu la regardes, perdu dans tes pensées. Non, Zoey ne peut pas être attirée par toi, elle est bien trop différente. C'est n'importe quoi, elle joue juste avec tes nerfs. Se moque. Elle... C'est absurde... je veux dire... Elle en pince pas pour moi, ta sœur. C'est des conneries, pas vrai ?

Machinalement, ton doigt court sur la tasse. Ce n'est pas de la honte que tu ressens, où le plaisir de plaire à quelqu'un, non, c'est une soudaine peur qui t'envahit l'échine. Si c'est vrai, ça changerait tout. Ta vision d'elle, sa vision de toi, votre relation, la possibilité de continuer de vivre sous le même toit... Alors tu bois ton café d'une traite. Elle préfère les mecs plus jeunes et un peu plus... "fous", de toute façon. Je suis pas vraiment un mec intéressant, tu sais. Je passe ma vie au boulot. Ouais... Ouais, c'est des conneries, tu veux juste embêter ta sœur, non ? Tu reposes finalement tes yeux sur elle, avec un petit sourire complice, en attendant - espérant, plutôt - que Maya cesse la comédie et te rassure enfin.