"live out all the rest" lucy

Dans un sens, j'aurais préféré qu'elle ne me suive pas, que je reste là, à devoir gérer combien j'étais ridicule, combien mes pensées envers lui à l'époque avait été impure. Mais elle n'abandonna pas, pas cette fois, elle m'avait rejoint avant de m'insulter de con. Si seulement. J'avais l'impression d'êre bien plus. Un nouveau juron plus tard, je n'avais pas relevé les yeux. À quoi bon ? J'étais pitoyable ne cet instant, incapable de faire preuve de la moindre force. Alors oui, pourquoi lui dire ça maintenant ? Parce que j'étais lâche ? Incapable de vivre avec ça sur le coeur en le sachant ici ? Je n'avais pas de réponse toute faite à lui donner. Et puis elle s'emporta un peu plus. Je n'avais pas à parler à la troisième personne, à faire comme si elle n'était pas là. La suite… Ce fut un long silence qui m'arracha la gorge. Me redressant, je voyais des larmes commencer à perler le long de ses cils. J'étais ce genre de garçon ? Le genre à faire pleurer les filles ? « Je… », commençais-je la voix noué par tout un tas de chose. « J'ai pas ta force, j'ai jamais su assumer et à l'époque j'ai jamais su te le dire. J'ai cru pendant longtemps que tu savais, que t'étais parti car je te dégoutais autant que je me dégoutais. », j'avais toujours été plus tolérant avec les autres qu'avec moi, c'était une évidence. Depuis mon enfance je n'avais rien laissé passé. « J'arrivais plus à vivre avec ça. T'as l'air heureuse et je sais pas, et j'avais peur de passer pour ce que je suis dans le fond, intolérant. », beaucoup trop accroché à la religion. Beaucoup trop attaché à ce que dieu attendait de nous. « C'est pas ton physique putain, j'étais amoureux de mon meilleur ami, car tu étais tout, car tu osais faire des choses, car tu me poussais hors de mes limites, car tu n'étais pas simplement un observateur de la vie, mais parce que tu semblais la vivre. Et j'aimais aussi ces moments de doute, ces moments de calme, de silence, j'aimais tout, si ce n'est le sentiment que j'éprouvais. », celui d'aimer un homme. « J'avais peur, j'avais peur de te perdre en avouant les choses. On va pas se mentir, on vient de famille tout sauf facile et moi, j'y ai toujours bien trop cru… », ma voix avait fini par trembler. « J'avais peur. Et quand t'es parti j'avais plus personne. Aujourd'hui t'es là, t'es magnifique, plus épanouie que jamais et je fais simplement pas partie de ce nouveau monde. J'ai pas ma place avec mes doutes et mes incertitudes et… » ma gorge était bien trop noué pour laisser passer plus de mot. Je ne savais pas comment expliquer quoi que ce soit. J'avais toujours refusé d'exprimer quoi que ce soit, j'avais toujours tout noyé. Aujourd'hui j'étais là, incapable de coucher des mots. Baissant finalement les yeux, je repris, presque abattue, « Dis-moi où il y a de la place de ta vie pour un type qui a toujours eu peur de dire à une autre personne qu'il l'aimait car il avait peur. T'as déjà mené un combat où je n'ai pas pu t'aider. J'ai rien à t'apporter. Je m'étais accroché jusqu'à présent en pensant que le sentiment partirait. Mais non, aujourd'hui encore j'aime Lucas, mais je suis impressionné par Lucy. T'as changé, en mieux, car tu te sens enfin bien, là ou tu devrais être. Moi j'ai pas changé, j'ai pas envie de te rappelé le passé, j'ai pas envie de te faire du mal. » je savais que dans le fond c'était la même personne, mais j'avais peur de pas être à la hauteur. « Ne penses pas que je désapprouve tes choix. J'aimerais avoir la même force que toi. Le fait est que j'ai jamais cessé de t'aimer et aujourd'hui encore plus qu'hier, j'aurais rien à t'apporter. ». Je n'arrivais pas à m'exprimer, à lui dire ce que je pensais. J'avais l'impression d'être idiot, ridicule. De ne jamais avoir su comment faire ou dire les choses.

thomas wilder & lucy monroe

live out all the rest

Alors c'était cela. C'était cela qui s'était caché derrière son trouble depuis qu'il l'avait retrouvée, derrière ces silences, derrière sa voix brisée lorsqu'il l'avait presque prise pour Lucas à la librairie il y a quelques semaines. Avant cela, c'était ce qui s'était caché derrière les regards un peu longs, les sourires caressants et les nuits d'insomnie. Et Lucy le savait plus que personne car la même chose était dissimulée en elle. Mais elle n'était pas Thomas. Elle ne se pensait pas forte, bien au contraire, elle avait déserté, comme une lâche. Elle s'efforça de se retenir de pleurer. Vingt-trois ans aujourd'hui. Et voilà qu'elle en était à essayer de faire de deux morceaux incompatibles de sa vie un espèce de sumbolon factice qui s'émiettait de minute en minute. Ces mots qu'elle écoutait en silence lui étaient douloureux, nécessaires à la fois sûrement. Car ils lui rappelaient combien elle l'aimait. Ce n'était pas de la manière dont on désirait les autres, dont on languissait sous les étreintes, mais de cette manière de se sentir profondément lié à quelqu'un au point de ressentir chacun de ses sentiments aussi véritablement que si c'était les siens. Elle l'aimait et pourtant c'était par sa faute qu'il ressentait et qu'il avait ressente une telle tristesse et une telle culpabilité; elle en avait fait cet être lunaire persuadé de ne rien valoir et de ne rien avoir été dans sa vie alors que rien au monde n'était plus faux. Elle devait réparer ça, au moins, au minimum. Elle devait le rendre au monde. Et après seulement elle déciderait si elle méritait ou non une place dans sa vie. Tout cela elle aurait voulu lui dire là, dans un monde idéal. Mais ses vannes sentimentales à elle étaient plus que rouillées, et elle s'en savait incapable. Elle fit quelques pas vers lui, franchissant la distance entre eux pour l'attirer vers elle et le serrer dans ses bras. Une fois encore elle retint ses larmes même si ses mains tremblaient probablement. Lucy n'arrivait pas à croire qu'elle ne l'avait pas fait depuis qu'elle l'avait revu, c'était ce que faisaient les amis perdus qui se retrouvaient non ? Sentir sa présence lui fit du bien, et elle était rassurée d'avoir brisée cet espèce de vitre invisible qu'il y avait eu comme s'ils étaient des étrangers l'un pour l'autre. Elle sourit doucement. Il y avait trop de choses qu'elle voulait dire. Mais ce qui était sûr c'est qu'elle ne voulait pas qu'il reste dans cet état. « Mais tu m'as aidée. Les coups de déprime et les crises d'angoisse, j'en serais devenue folle sans toi. Tu le sais. » Elle serra les lèvres. « Toute seule, je suis partie dans tous les sens, surtout au début, je t'avais plus comme ancre tu vois ? J'ai besoin de toi, j'aurais toujours besoin de toi. » Elle avait finit doucement, par pudeur qu'elle n'avait que par rapport à ces choses-là. Elle serrait ses mains l'une contre l'autre en tentant de réfléchir à ce qu'elle disait. Les larmes n'arrêtaient pas d'essayer de venir mais elle les repoussait comme la marée. Il fallait qu'elle dise la vérité. « Si tu préfères qu'on en finisse là, si tu penses que c'est mieux pour toi, pour moi, dis le moi clairement. Je me plierais. Je veux pas te faire plus de mal que ce que j'ai déjà fait, et c'est ce qui arrivera parce que tu vas détester la personne que je suis devenue et parce que je suis pas prête à... à t'aimer et parce que pour le coup j'ai vraiment plus rien à t'apporter à part des emmerdes. » conclut-elle avant de fermer les yeux et de baisser la tête. Voilà qui était dit, au moins.

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J'avoue avoir été surprit lorsqu'elle brisa la distance entre nous pour me prendre dans ses bras. Elle n'était pas plus petite que moi, nous avions toujours été sensiblement pareil à ce niveau. Restant un instant immobile, je finis par la prendre dans mes bras aussi , la serrant un peu plus dans mes bras à mesure qu'elle parlait. Comment elle pouvait avoir besoin de moi ? J'étais incapable de réagir correctement à la moindre chose. J'étais tétanisé à l'idée d'avoir pu aimer un homme, lui surtout. Tétanisé à l'idée d'être responsable de tout ça. Reprenant nos distances, j'étais incapable de parler surtout lorsqu'elle proposa d'en finir là. Je venais de la retrouver, et si j'avais moi-même proposé ça, je n'étais pas certain de savoir l'assumer. Elle voulait pas me faire plus de mal qu'elle n'en avait déjà fait. Assurant que cela arriverait à nouveau car j'allais détester la personne qu'elle était devenu et car elle n'était pas prête à m'aimer. Ma gorge me faisait mal à force d'être noué et c'est sans doute pour cela que ma voix eut du mal à percer la barrière de mes lèvres. « Ni toi ni moi ne sommes prêt de toute évidence. », je ne dirais pas que j'étais amère, mais j'aurais voulu faire une simple chose comme depuis le premier jour ou je l'avais aimé. Juste l'embrasser. Mais j'avais bien trop de retenu pour faire quoi que ce soit. J'étais bien trop mal à l'aise. Incapable de dépasser mes propres préjugés. J'étais perdu. « Je veux pas te perdre une nouvelle fois Lucy, la première fois à fait beaucoup trop mal. », je n'étais pas prêt à faire face, mais Lucas m'avait toujours poussé plus loin, je pouvais le faire pour elle. Je devais. « J'ai juste besoin de temps pour accepter tout ce que je repousse depuis des années. », et je ne savais même pas si j'y arriverais. J'étais lâche. « Si on s'écoute on a rien à s'apporter de bon… », finis-je par dire. Elle avait tenu le même discours que moi. J'étais prêts à la laisser partir il y a une minutes mais je n'en avais tout simplement pas la force et la seule chose que je savais faire à présent s'était me contre dire. J'étais paumé, c'était évident, pas besoin d'être expert pour le comprendre. Je n'avais rien à proposer, je ne voulais pas la ralentir pourtant, je restais planté là. Elle pouvait bien avoir changé, moi je n'avais jamais bougé, ce qui était sans doute plus déplorable. Sans elle, lui, je n'avançais pas.

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Il va sans dire que Lucy n’aurait jamais imaginé que les choses se passent comme cela entre eux après ces quelques années. Elle avait supposé que Thomas serait en colère. Il avait été tout sûrement, heureux, triste beaucoup plus, désemparé, gêné; mais en colère, pas une seule seconde. Elle oui, elle était assez en colère, elle avait envie de lui reprocher de ne rien lui avoir dit avant qu’elle parte, parce que ça l’aurait retenu, enfin probablement. Elle était aussi en colère qu’il ait toujours cette attitude à se faire tout petit, à se cacher et à la mettre sur un piédestal, en dépit de tout le mal qu’elle avait fait, elle trouvait ça révoltant. En somme, elle était en colère, même si elle n’avait pas vraiment de raison pour l’être, simplement parce qu’elle ne savait pas vraiment quoi ressentir d’autre face à tout ça et qu’elle avait été au plus simple à gérer. Sa colère s’était muée en agacement, puis en résignation. Lucy secoua la tête. Non, ils n’étaient pas prêts, en même temps ils n’étaient prêts à rien vraisemblablement puisque Thomas était même pas foutu de se poser cinq minutes pour déjeuner tranquillement avec elle en parlant de la pluie et du beau temps. Donc bon, c’est sûr qu’à ce niveau là, y avait du chemin à faire. Et parfois il valait mieux s’arrêter et attendre le bus que prendre un chemin à travers la forêt plein de ronces pointues dans lequel on risquait probablement de se faire assassiner par un serial killer ou piétiner par une famille de sangliers… Ouais… Enfin bref, fin de l’analogie… Bizarrement, ça mettait la jeune femme assez mal-à-l’aise qu’il l’appelle Lucy, elle s’y habituerait sûrement. Elle lui aurait bien dit de l’appeler par son ancien prénom s’il le souhaitait, elle s’en foutait après tout de ce que les autres pouvaient penser depuis le temps, mais là pour le coup c’est lui que ça risquait de mettre mal-à-l’aise. Et après tout, ça lui faisait plaisir qu’il fasse l’effort. En dehors de ça, elle ne savait ni quoi dire, ni quoi penser. Elle admettait qu’elle avait elle aussi probablement besoin d’un peu de temps pour mettre tout ça au clair. Ce n’était vraiment pas son genre d’habitude de prendre son temps, mais parfois c’était nécessaire, d’ailleurs c’était sûrement une leçon qu’elle tenait de Thomas vu à quel point ce n’était pas dans son caractère. Mais quand même, elle lui demandait de lui dire clairement ce qu’il attendait d’elle et lui se contentait de l’embrouiller encore plus avec ses émotions contradictoires. Typique ça. Elle soupira et se mit une main sur le front. Il n'y avait vraiment rien qu'elle détestait plus que se trouver dans la situation de prendre une décision claire. « Visiblement tu sais pas ce que tu veux. Moi non plus. Donc tu sais quoi, t'as besoin de temps, prends ton temps s'il-te-plaît, arrête de te prendre la tête avec moi. Je retire ce que j'ai dis d'accord, j'ai pas besoin de toi, je vais très bien. Laisse moi hors de ta vie. » Elle avait dit cela pas agressivement mais assez froidement pour que ça ait l'air ferme. Si elle insistait autant pour qu'il s'éloigne un peu, c'était aussi parce qu'elle-même en avant besoin, de ce temps. Elle rajusta son sac sur son épaule en s'apprêtant à partir. « De toute façon maintenant tu sais où je travaille... » Elle fronça les sourcils, réalisant cet état de fait alors qu'elle l'énonçait. «...donc si tu t'ennuies vraiment de moi, t'auras qu'à venir acheter des Pépitos. » Elle avait dit ça froidement mais elle avait juste sortit le premier article du supermarché qui lui passait pas la tête donc bonjour la crédibilité. Elle serra les lèvres pour masquer un peu son début de sourire. Finalement, elle se laissa aller à sourire, mais un peu tristement. Elle leva son bras et effleura le côté du visage de Thomas de ses doigts, avant de l'abaisser et de commencer à partir. Elle se retourna tout de même pour ajouter :« Tu m'as même pas dit joyeux anniversaire ! » avec un petit sourire, avant de le gratifier d'une imitation très molle du salut militaire.

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