Good morning to you too - Aeden & William

- William Casper Ford, mais heu… je crois que tu sais déjà qui je suis.

Un air un peu gêné, mais un grand sourire. Un silence malaisant tandis que les informations font tranquillement leur chemin jusqu'au cerveau tandis que je passe sous le regard d'analyse. Finalement, le bruit du jardinier de la maison voisine me tire de cette scène du passé pour me relancer dans la réalité, à Los Angeles avec toutes ses activités ...parfois trop matinales. Ce type va se faire des ennemis dans le quartier à faire la tondeuse et le coupe bordure aussi tôt dans la journée, je le jure. Bon, je peux reconnaître que mon retour aux petites heures du matin n'était probablement pas non plus au goût de certains, mais pour une fois que j'avais envie de faire la grasse matinée.

D'ailleurs, rendu à ce point, sachant que je ne risque pas refermer l'oeil vue ce qui me passait en tête avant que le jardinier ne mette en marche sa machinerie, une vraie douche ne serait pas pour me déplaire. Le froid de la tuile et l'eau chaude achèveront peut-être d'effacer autant mes dernières heures éveillés qu'endormi et l'habituel malaise qui accompagne le tout.

***

En simple boxer et t-shirt, mes pieds sur le plancher de bois, je m’ébouriffe machinalement les cheveux, laissant possiblement des gouttelettes d’eau sur mon passage tandis que je me dirige vers la cuisine. La cafetière mise en marche, je prépare ce qui composera mon premier repas de la journée : gruau et fruits. Simple et efficace, en plus d’être bon.

Café dans une main et bol dans l’autre, je me dirige vers la fenêtre dans le but appréciable de profiter que le jardinier ne mène plus un vacarme et admirer la vue extérieure et la cohue des trottoirs, tranquillement perché sur mon poste. À peine le cul posé, des coups se font entendre contre le battant de la porte d’entrée. Pourtant mon colis n’est pas censé arriver avant deux jours encore.

- J’arrive.

Délaissant mon repas sur le rebord, je vais ouvrir. Ce n’est pas un quelconque type d’une compagnie de livraisons, non, c’est plutôt une tête connue.

- En manque si tôt le matin? Ta nuit devait être géniale, fis-je, sarcastique avec un sourire en coin et un air moqueur.

Pourtant, je m’efface pour le laisser entrer, li laissant même toute la place puisque je retourne à mon post d’observation.

- Y’a du café, indiquais-je simplement, pointant la cuisine sans me retourner.

Des coups cognés sans délicatesse, contre le battant de la porte d'entrée. Ma première pensée est pour le colis que j'attends, mais qui ne devrait pas encore arriver avant deux jours normalement, et je me dis que si le coursier est aussi doux avec les paquets, je vais retrouver le mien en miettes. Génial. Avertissant que j'arrive et que je l'ai entendu, lui permettant d'arrêter de bûcher comme un dingue pour m'attendre un minimum, ce qui me permettrait qu'il ne reparte pas avec l'emballage, je me dirige vers la porte pour ouvrir. Pourtant, le brun qui se trouve derrière la porte n'a rien de postier et c'est peut-être aussi bien pour la survie de ma commande.

L'accueillant avec une pique, je le laisse tout de même entrer à sa guise, retournant au repas que j'allais commencer avant qu'il ne coupe la fraîche quiétude de mon appart. Ayant apparemment besoin d'exercer ses cordes vocales, Aeden explose en deux questions à mon égard avant d'accepter ma proposition de café et d'aller se servir. Faut bien trouver quelques chose pour apaiser sa gorge s'il veut encore m'hurler dessus, mais de mon point de vue, le sorbet dans le congelo serait plus efficace pour ça que le café encore fraîchement coulé. Est-ce que je devrai faire attention pour le cas ou il serait tellement furax qu'il me la lancerait par la tête? C'est une possibilité à envisager, mais il me manque des données pour le calculer. Entre autre la raison de sa soudaine colère. Il croit à cette histoire de calpin numérique ou je suis censé noté tous mes coups d'un soir avec note à l'appui? C'est la petite nouveauté qui a couru à mon sujet, mais si j'assume parfaitement avoir assez de conquêtes de courtes échéances, j'ai mieux à faire de mon temps que de les noter. Et puis, ça va encore, si j'oublie - parfois volontairement - les noms, les visages ou autres parts d'anatomie me reste assez bien en mémoire dont j'évite de doubler un coup de merde.

- Je dors très bien la nuit, Aeden, merci de t'en soucier, répondis-je sarcastiquement, m'installant tranquillement sur le large rebord de fenêtre.

Ce n'est pas tout à fait véridique puisque mon sommeil est souvent abrégé au petit matin et qu'il m'arrive assez régulièrement de rentrer tard, mais bon, on fait avec. J'ai choisi cette vie après tout. Si ça ne me convenait, j'aurais qu'à me bouger le cul pour faire autrement.

- Et pour quelle raison j'ai droit à ton courroux au passage de ta séance de cardio matinale? Le questionnais-je avant de prendre une gorgée dans ma tasse.

Sincèrement la liste de ce qu'il pourrait me reprocher est vraiment longue s'il décide de s'y mettre ou s'il s'est collé dans la tête que je lui étais redevable d'une quelconque manière. Le pire scénario serait qu'il s'imagine qu'on se soit juré fidélité et monogamie à un moment ou un autre, mais j'ai des doutes sur le fait qu'il soit si taré. Je veux bien qu'il soit une proie agréable, mais ça fait un moment déjà qu'il a compris que je n'appartiens à personne. Du moins, je le lui souhaite pour sa santé mentale.

Mes répliques ou mon ton de voix condescendant ne sont pas particulièrement au goût de mon visiteur matinal puisqu'il me claque un sermon, me menaçant de me casser la gueule si je l'ouvre encore. J'hausse à peine un sourcil, avalant la bouchée de mon petit déjeuner que je viens de prendre. Il lèverait la main sur moi? Le grand champion s'attend peut-être à ce que je me laisser frapper sans broncher? Je ne dis pas que le mettrai au tapis en moins de deux, je n'ai aucune idée de comment il se bat, mais s'il s'attend à une victoire facile, il y laissera peut-être quelques souffles. En attendant d'en arriver là, je continue de le voir déverser une colère à mon égard dont je ne comprends pas encore le point d'intérêt. Du moins jusqu'à ce qu'il ne mentionne l'adresse que je lui ai donné. Pour le coup, je pouffe de rire. Ha, parce qu'il est aller voir, ce con! Il a bonne mémoire s'il s'en est souvenu, faut lui donner ça! Oh, mais la tête qu'il a dû faire quand il a compris! Je l'imagine regarder son écran en se disant qu'il s'est peut-être gourré ou que je me suis gourré, puis finir par en arriver à la conclusion que c'était bien volontaire de ma part de lui fournir l'adresse d'un cimetière. Putain, j'aurais voulu voir! Encore une chance pour lui qu'il aie pas décider de se taper la route jusqu'à Napa!

- Rassure-moi, t'as pas fait tout le chemin jusque là pour vérifier? Demandais-je en étouffant un rire dans ma tasse de café.

C'est quoi? Sept peut-être huit heures de route en bagnole? Plus le temps de chercher la dite adresse. Il y aurait perdu une journée. Ha, mais ça expliquerait peut-être les vêtements confortables et l'arrivé matinale s'il a rouler toute la nuit pour revenir m'en flanquer une. Malgré qu'en regardant bien, je n'ai pas l'impression que des cernes ou des yeux rouges prouvent qu'il a passé une nuit blanche sur la route.

- Elle ne représente rien pour moi, lâchais-je sincèrement et simplement, reprenant mon sérieux, avant de continuer de manger tranquillement, m'attendant à le voir exploser dans les trois secondes suivant ma déclaration. Hormis une pierre tombale à Nappa et le compte en banque qu'elle a laissé. Mais si tu veux tomber dans l'analyse, qu'est-ce que ça fait d'elle si elle me considérait comme une simple erreur de parcours? Je suis curieux d'entendre ton avis, le coupais-je avant qu'il n'ouvre la bouche.

Honnêtement, oui, ça pousse ma curiosité ce qu'il pourra en sortir. Ce n'est pas que je n'étais pas le préféré de la matronne, nah j'étais carrément une tâche sur son dossier, même si, allez savoir pourquoi, quelques années plus tard, le tout passait très bien dans sa tête. J'ai jamais su la logique de tout ça et c'est pas comme si y'avait quelqu'un qui pouvait me donner une réponse à ce sujet désormais. Pour ce que ça me dérange de tout façon… J'ai autre chose à faire de ma vie que de ressasser le passé. Même si celui-ci s'invite volontier dans mes nuits, mais c'est un autre sujet.

J'étouffe un nouveau rire dans ma tasse tandis qu'il m'exhorte à réfléchir, affirmant qu'il n'a pas l'énergie et le temps pour tenter de retrouver ma mère. Je ne contredis pas son emploi du temps, c'est une vision propre à chacun et si j'ai souvent l'air de ne rien glandé de mes journées de congé, je n'ai pas pour autant que j'ai envie de sacrifier ce temps pour un quelconque projet ou, pire, pour autrui. Mais alors qu'il se défend, je ne peux m'empêcher de le regarder avec un regard amusé : il a quand même vérifié cette fichue adresse! Il m'étonne, faudra peut-être je fasse attention à ce que je lui dit à l'avenir. Pourtant, je me permets de confirmer ses pensées même s'il ne voulait peut-être pas l'admettre totalement puisque je passe probablement dans son livre pour le dernier des salauds en affirmant que ma mère ne représente rien pour moi hormis son compte en banque. Mon cher et innocent Aeden, t'en aurais long à apprendre si je me donnais la peine d'en parler! Pourtant, je préfère entendre sa version d'analyse sur la madre que son esprit encrée sur la famille pourra formenter. Est-ce que ça lui expliquera soudainement les raisons de mes coucheries à droites et à gauche, comme une illumination divine? Peut-être. La vérité est beaucoup moins difficile à trouver cependant : squatter le lit de quelqu'un d'autre est une manière simple et peu coûteuse de se trouver un toit pour la nuit lorsqu'on a pas envie de se claquer les quelques heures de routes qui nous sépare de notre propre lit lorsqu'on sort. Et tant qu'à le squatter, autant s'y trouver une activité intéressante - le plus souvent, sans l'être toujours malheureusement.

Pourtant sans me donner cette analyse à laquelle je m'attends, il se contente d'hocher la tête et soupire, comme fatigué de notre échange. Continuant de manger, je le laisse se perdre dans ses pensées, m'attendant à le voir exploser à nouveau ou s'endormir la tête sur la table. Je n'ai pas mis de somnifère dans le café, faut pas s'inquiéter. Ayant renoncé à voir la vie s'éveiller à l'extérieur, je me contente de fixer tranquillement mon visiteur puisqu'il ne me lâche pas du regard.

Sa fatigue semble l'amollir plus que je ne croyais puisque finalement, lorsqu'il ouvre la bouche, c'est pour me demander la raison pour laquelle on continue de se voir si je ne fais que l'énerver constamment. Sans dire un mot, je me contente pourtant d'hausser un sourcil en avalant la bouchée d'avoine fruitée que je viens de prendre. Plus étonné encore, je l'entends s'excuser de se mêler de mes affaires. Prenant une dernière gorgée de café, laissant ensuite la vaisselle un peu plus loin sur le large rebord de la fenêtre, je le regarde se lever avant de daigner lui répondre calmement.

- Parce que tu as le souvenir que je n'étais pas aussi chiant lorsqu'on s'est rencontré et que t'as peut-être l'espoir que mon attitude peut encore revenir à celle de notre première rencontre et que tu pourras profiter de nuits de rêves sans que je ne tente de faire sauter un à un les fils de ta patience, hypothésais-je tranquillement, sans sourire crâneur pour une fois, semblant plus ouvert que je ne l'ai peut-être été avec lui depuis le débût.

J'entends ses mots, ils se font facilement un chemin jusqu'à ma cervelle, mais qu'est-ce que je pourrais dire de plus? Dois-je faire une crise parce que je m'en sentirais insulté, ses paroles colportant d'énormes fausseté à mon sujet au point d'en salir ma réputation? Non. Déjà, les grandes scènes, ce n'est pas pour moi. J'ai un certain honneur envers moi-même qui m'empêche de faire ce genre de truc. Peut-être est-ce un égo démesuré ou un complexe narcissique, mais bon, ce n'est pas un trait que je considère mauvais.

Pour en revenir à ce qu'il cite, j'accorde plusieurs points à Aeden. Pour commencer, il est vrai que je ne suis "doux et gentil" que lorsque j'en ai envie. Lorsque le calcul m'apporte cette solution dans l'équation "action A sur personne B = nuit de plaisir" avec une possibilité de variable de profit "spectacle de déchéance" à plus ou moins courte échéance. Certains diront que je suis froid et calculateur en amour. Je répondrai simplement d'arrêter de vivre dans leur monde de bisounours et de réaliser qu'une histoire de baise, n'a rien d'une histoire d'amour! Certains diront que je suis un connard en puissance, vulgaire et profiteur. J'en dirai que la vulgarité est relative et que son appréciation est propre à chacun, même si j'admets facilement pouvoir être cru dans mes paroles par instants. Quand aux deux autres aspects… ce n'est que vérité, mais la plupart ne connaîtront jamais que la pointe de l'iceberg.

Outre ça, mon visiteur, même s'il ne semble pas apprécier cette révélation, a finalement fait le calcul entre la valeur du plaisir de nos nuits partagées versus le poids de mon caractère lorsque peu de filets ne tiennent en place le masque qu'il m'arrive de porter lorsque je travaille à faire tomber hommes ou femmes dans mes draps ou dans les leurs. À ce qu'il m'apparaît de ses déduction, le résultat est à mon désavantage.

Je me lève à sa suite puisqu'il semble bien ancré sur son idée de quitter mon appartement. Cependant, la porte s'ouvre à peine que je m'y appuie d'une main par-dessus lui pour la refermer, lui barrant en un sens la route, l'obligeant presque à s'adosser alors que peu de centimètres nous séparent. Mes yeux bleus fixés sur ses pupilles mordorées, j'en reste silencieux un instant avant de combler l'espace qui restaient entre ses lèvres et les miennes. Doucement, tranquillement, je me permets de l'embrasser avec plus de douceur que je n'ai pu en développer à son égard depuis qu'on s'est rencontré.