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 Souvenirs, souvenirs

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#MessageSujet: Souvenirs, souvenirs    Souvenirs, souvenirs  EmptyVen 20 Juil - 17:53

Souvenirs, souvenirs
Word est mon ami !


JUILLET 2018, quand l'inspiration frappe à ma porte

J'étais là, une fois encore face à l'écran de mon ordinateur. C'était devenu une sorte de rituel ces derniers temps. Je n'avais pas l'ambition d'en faire quelque chose, encore moins d'écrire un livre comme peuvent le faire certaines personnes qui s'estiment bafouer. Vous savez les ex qui étalent leurs malheurs dans la presse à scandale, ou qui vendent pour des millions de dollars d'hypothétiques droits pour un livre, pour un film. J'y ai pensé, non pas pour l'argent, ou pour la gloire, mais juste pour raconter la vérité, mais aussi pour faire souffrir Sally autant qu'elle m'a fait souffrir. Allez en reprend ! Ordinateur sur le bureau, je craque mes doigts pour mieux me préparer à l'exercice. Il est tard, trop pour le commun des mortels, mais visiblement pas assez pour moi. Word s'ouvre, c'est parti !

Il y a des moments dans la vie que l'on grave dans notre mémoire. Un premier baiser, un premier amour, la naissance d'un bébé, un mariage. Additionnés, les uns aux autres, ces évènements vous donnent l'impression que rien n'est impossible, que vous êtes invincible, que la vie est un cadeau. Puis, il y a des moments que l'on préfère oublier, mais qui restent gravés en mémoire. Une image, une vidéo, des rumeurs, des mensonges. Un siège inconfortable dans un tribunal qui l'était tout autant. De ce moment, je n'ai rien oublié, tout comme le regard de Sally, qui restera gravé pour une vie, que je n'espère pas trop longue. C'est tellement dur à porter, inenvisageable de voir la femme que vous avez tant aimé éprouver à votre encontre autant de haine. Le premier coup de marteau retentissait encore dans ma tête, comme un écho lointain encore perceptif même après six ans.

« Avez-vous quelque chose à ajouter ? » venait-on de me demander alors que je restais immobile, interdit, silencieux après avoir entendu ce qui me semblait être une sentence. Sally venait de gagner la bataille, âpre, insidieuse, violente, sans limite. Jamais, à aucun moment, elle n'a retenu ses coups. Le juge réitéra sa demande, je ne sais plus avec exactitude ce qui a franchi le seuil de mes lèvres une fois la demande formulée, je me souviens juste de l'impuissance qui m'a envahi. J'étais incapable de plus, tant j'étais accablé, tant je ne comprenais pas ce qui venait de m'arriver, tout était allé si vite. Mon regard a alors croisé une dernière fois celui de Sally, qui une fois sa victoire prononcée avait, me semblerait-il, quitté le tribunal sans attendre. C'est là, après les multiples insultes, publiques ou un privé, que je me suis laissé aller moi aussi au jeu du « je te déteste sombre merde ! » Avant, j'avais toutes les raisons de le faire pourtant. Dans mes souvenirs, peut-être étaient-ce dans mes rêves, je me revois courir après Sally hors du tribunal, pour la supplier à genoux, pour lui dire que ce ne sont que des conneries, que je suis innocent, que ce ne sont que des rumeurs. Mais je n'ai rien fait, je suis resté assis quelques minutes, avant de me lever, amer d'avoir perdu et en colère d'être le coupable d'un crime que je n'avais pas commis.

Remontons à quelques années plutôt, au moment-même où la célébrité de Sally a explosé. Je ne voulais ni l'admettre, ni le reconnaître, mais elle était encline à un profond changement et son ego en proie lui aussi à une évolution. Il lui arrivait d'être de bonne humeur, d'être rayonnante, une super maman, mais il lui arrivait aussi d'être cassante, sèche, absente, obsédée par sa carrière, plus qu'elle ne l'était avant. Moi, je continuais à l'aimer, à la soutenir, car je n'ai jamais douté de son talent. Et lorsqu'enfin, on lui fit signer son contrat pour une série, sur une grande chaîne, j'exultais. « - Bébé viens ! On va poster ça sur insta ! » Oui, à l'époque, les réseaux sociaux ne me faisaient pas horreur. Fier de ma femme, je n'hésitais pas à abreuver les plateformes de statuts, de photos, de vidéos. Je me souviens que nous en abusions un peu, loin d'imaginer que la série deviendrait aussi populaire, ainsi que son personnage. Les fans abusaient peu à peu sur les réseaux sociaux et en exigeaient toujours un peu plus de Sally. Moi qui aimais me prêter au jeu de la proximité, j'ai commencé à m'en détachais. Ca m'exaspérait tellement, de lire des commentaires sur ce qu'ils appelaient un ship. Certains faisaient des montages avec des photos personnelles et collaient la tête de ce gars qui jouait avec Sally, à ma place. C'est quoi leur problème hein ? Mais je suis resté, j'ai tenu me rappelant le meilleur pour éclipser le pire.

Au loin, les premiers rayons du soleil tranchaient avec l’obscurité et en fixant l’horloge, je compris qu’il était temps que je lâche le clavier de mon ordinateur au profit de mon lit…

Lecture à suivre…


 
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#MessageSujet: Re: Souvenirs, souvenirs    Souvenirs, souvenirs  EmptySam 28 Juil - 21:54

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JUILLET 2018

J’étais toute seule à la maison ce soir-là. Sunny passait la nuit chez une amie, mon assistante avait sa journée et ne reviendrait que demain matin, mon garde du corps aussi. Je m’ennuyais à mourir mais j’avais la flemme d’appeler quelqu’un pour sortir. Je décidai alors de faire un peu de tri. En faisant du rangement dans de vieilles affaires, j’étais tombée sur quelques articles de presse que ma mère m’avait dit de garder. Curieuse, n’ayant rien à faire à part boire du champagne, je m’assis sur mon lit avec le classeur contenant ces vieux articles. Je ne prenais plus la peine de les collectionner mais je soupçonnais ma mère de le faire. Sans doute pensait-elle qu’un jour ça vaudrait son pensant d’or.

Interview décembre 2004

JOURNALISTE : Sally Hamilton, bienvenue ! Nous sommes ravis de vous recevoir aujourd’hui. Comment allez-vous ?

SALLY : Bonjour ! Je suis très heureuse aussi d’être ici. Ça va très bien !

J : Voilà maintenant presque deux ans que vous incarnez ce rôle qui vous a fait connaître dans la série à succès qu’on ne nomme plus. Comment vous sentez-vous vis-à-vis de ça ? Que pensez-vous de l’évolution de votre personnage qui prend de plus en plus d’importance ?

S : Pour tout vous dire, je me sens extrêmement chanceuse et reconnaissante. C’était mon plus grand rêve d’exercer mon métier d’actrice et d’en vivre. C’est vraiment génial, et j’ai énormément de chance de travailler avec une super équipe. Quant à mon personnage, je l’aime de plus en plus, c’est une opportunité incroyable de jouer cette fille. Et malheureusement, je n’ai pas le droit de vous parler de ce qui va lui arriver.

J : Vous semblez très épanouie dans votre métier malgré votre jeune âge. C’est bientôt la pause hivernale. Que prévoyez-vous ?

S : Nous allons fêter Noël en famille avec mon mari et ma fille, et sûrement quelques vacances bien méritées.

J : Votre vie personnelle semble bien remplie également.

S : Oui, je suis très heureuse, j’ai beaucoup de chance.


Je tournai la page en secouant la tête, roulant des yeux. Ce que j’étais naïve. J’avais tout juste dix-neuf ans, la deuxième saison de la série qui m’avait fait connaître battait son plein, Nolan n’était pas encore cet immonde connard qui m’avait trompée et Sunny était toute mignonne, encore incapable de me répondre insolemment. Oui, tout allait pour le mieux et j’étais loin de me douter que ça ne saurait durer. Je pris une gorgée de champagne avant de reposer la flûte sur la table de nuit et de tourner la page pour voir ce que j’avais pu dire d’autre comme bêtise, lors d’une autre interview.



 
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#MessageSujet: Re: Souvenirs, souvenirs    Souvenirs, souvenirs  EmptyDim 29 Juil - 22:29

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JUILLET 2018, quand l'inspiration frappe à ma porte

Comme à l'accoutumée, je n'avais dormi que quatre heures, peut-être cinq tout au plus. Par habitude, je ne m'offusquais plus de ne pas atteindre le quota des huit heures que bons nombres de charlatans en blouse blanche conseillaient et que dire des magazines de santé, de bien-être et autre connerie qui fleurissait à tout vas. Moi quatre heures me suffisaient pour recharger une à une mes batteries. D'autant plus que je n'avais pas, cette semaine, un emploi du temps de ministre. J'avais prévu de flâner dans les rues, avec ma réserve de flyer à la recherche de talents à exposer sur ma scène. Car il est vrai, la ville des anges et plus particulièrement ses rues, ne manquait pas de talents qui pour la plupart, tentaient, hormis le chaotique démarchage en maison de disques, de se faire repérer sur la plage, dans un café, sur un coin de rue. Je voulais trouver ces pépites, c'était ma mission et les convaincre de venir sur ma scène ouverte, les payer, pour mettre en valeur leur talent et qui sait, permettre une révélation, car je n'étais pas sans savoir, que quelques producteurs, arpentaient quelques fois le Big Apple. Pour l'heure, il me fallait rejoindre la salle de bains pour me délester des restes de la soirée passée. J'optais comme à l'accoutumée pour une douche tiède avant de cerner ma taille d'une serviette et de m'approcher du miroir.  Depuis ma dernière rupture, je m'étais enfin décidé à cesser de teindre mes cheveux, une coquetterie tellement illusoire, tout comme le régime vegan que je m'étais infligé pour faire plaisir à la demoiselle. En passant ma main sur mon menton, je sentis avec plaisir le poil dru de ma barbe de trois jours qui refaisait elle aussi son apparition, tout comme mes tempes grisonnantes. À quoi bon se travestir ? Quoique l'on fasse, le temps nous rattrape alors autant s'y plier et l'accepter.

Mais avant toute chose, je prenais quelques minutes pour choisir ma tenue. Le look est important à LA et depuis mon divorce, j'en prenais la pleine mesure, mais plus encore, en étant un patron, je me devais d'arborer une bonne image à l'inverse de la loque que j'étais six ans plus tôt. Riley qui flânait dans l’appartement, fit alors son apparition tandis que je dévalisais mon dressing.  Je sortis donc après réflexion un jean slim clair MELTIN'POT, le fidèle gilet anglais noir, en soie et sans manches, avec en dessous la chemise légère bleue à motif. Je me plaisais à remonter les manches laissant paraître, le bracelet en cuir agrémentait mon poignet, ainsi que ma chevalière sur l'index. Certains de mes tatouages étaient également visibles. Je complétais cela par mes fidèles Redskins Yedes marrons, compagnes de bien des aventures. J'aimais ce look et tant pis pour une éventuelle petite amie désireuse de changer tout ça. J'étais moi et pour rien au monde, je ne voulais changer cela. Et puis de toutes évidences, au vue des aboiement de mon berger australien de six ans, je n’étais pas le seul à apprécier. Fins prêts, nous quittâmes donc l'appartement pour flâner dans les rues à la recherche de nouveaux talents afin de rejoindre un ami pour se boire un petit verre. Tout ça avant de reprendre du service, toujours secondé par mon fidèle compagnon à quatre pattes.

0 h. J'aimerais, vous dire pile, mais je n'en suis pas encore à ce stade de maniaquerie. Déposant les derniers tabourets sur le comptoir, je m'apprêtais à atteindre les néons, avant de fermer les portes de sortie et de quitter enfin mon bar avec mon camarade à poils longs pour regagner ma petite forteresse de solitude. Douché et en tenue d'apparat (un caleçon à carreaux et le petit débardeur blanc qui vous exempte des grandes chaleurs) je regagnais ce qui me faisait office de bureau, tandis que Riley rassasié, regagnait son panier dans le salon. Et alors que j'allumais mon ordinateur, mon portable se mit à vibrer, m'annonçant de ce fait, l'arrivée d'un message émanant de mon petit soleil. En cliquant sur l'icône pourvue de son visage, je découvris bien malgré moi un cliché sur lequel je paraissais tout sourire et plus jeune avec celle que je considérais encore à l'époque comme étant le grand amour de ma vie. Il ne m'en fallut pas plus pour reprendre mon document Word. À l'écran paraissait, ce que j'avais écrit la veille et pour me rafraîchir la mémoire afin de ne pas redondant dans le propos, j'optais pour une relecture.

Certains faisaient des montages avec des photos personnelles et collaient la tête de ce gars qui jouait avec Sally, à ma place. C'est quoi leur problème hein ? Mais je suis resté, j'ai tenu me rappelant le meilleur pour éclipser le pire. Notre image, on joue avec, car nous sommes parfois incapables de l'accepter telle qu'elle. Quand on évolue dans un milieu tel que celui du showbiz, on ne peut se permettre d'être soi et ce même lorsqu'on ne fait que graviter autour de ce microcosme. On doit se plier, rentrer dans le rang, accepter de n'être plus qu'une ombre, faire des courbettes, portaient des fringues de pingouins lors des grandes occasions. Sur ma liste imaginaire, je pouvais dès lors tout cocher, preuve ultime de mon dévouement à Sally, pour elle j'avais accepté tout ça sans broncher. Mais les images peuvent aussi être déformées, et ce, malgré les efforts que vous déployez pour faire plaisir. Oui, avec toutes ces merdes, Photofiltre, Photoshop, Gimp ou que sais-je encore, tout paraît possible pour les amateurs de la bidouille, pour les colporteurs de faux, pour les « shippers. » Je pourrais leur allouer tout un chapitre tant j'ai à dire sur eux. Mais ne serait-ce pas leur accorder une trop grande importance ? Des êtres que l'on pourrait aussi rebaptiser « haters » tant leur haine est féroce. Je ne connaissais aucune de ces deux expressions au préalable, car pas au fait du champ lexical du « fan » Pour moi, à l'époque, ce n'était qu'une sorte de monde parallèle, « un truc de jeune » comme le dit ma fille lorsque j'essaie de m'intéresser à ce qu'elle aime et qui pourrait m'échapper au vu de mon âge « canonique »

Facebook, Twitter, Instagram, temple érigé à l'honneur de je ne sais quel dieu. Un être bien cruel en somme pour les non-adhérents. Les réseaux sociaux, que les jeunes n'ont de cesse d'encenser, m'avaient englouti, sans que je ne puisse rien faire pour m'en sortir. Mon crime ? Être le mari de Sally Hamilton, l'obstacle entre elle et ce type dont le nom continue à m'échapper. À l'écran, il formait un couple avec Sally, du moins son personnage. Une complicité et une alchimie sans cesse vantées sur ces plateformes du diable. Au début, je n'y prêtais que peu d'attention, mais lorsque par un malheureux hasard, j'ai découvert ce vivier de message à la gloire de ce #Ship je me suis rendu compte à quel point ma simple présence posait problème. La rançon de la gloire, dura-t-on. Pour préserver ma santé mentale, j'ai préféré mettre un terme à ma plongée en terre hostile pour regagner un rivage un peu plus accueillant. Du moins, il l'était au début. Place à un prochain chapitre. On dit que ceux qui sont absents ont tort. J'imagine que mon absence du domicile conjugal ne m'a pas donné raison. Et qu'en assemblant par la suite les pièces du puzzle, tout faisait sens pour les adeptes de la rumeur. Il était évident que tout ce temps passé au bar, n'était qu'une excuse pour cacher mon infidélité. Il y avait une part de vraie là-dedans, non pas sur l'infidélité, car oui désolé de décevoir mes hypothétiques détracteurs, mais je continue à l'écrire et à le crier haut et fort, je n'ai jamais trompé Sally. Cependant, je ne peux nier, n'avoir rien eu à cacher. J'aurais pu, j'aurais dû tout dire. Mais dire quoi ? »


Je lâchais mon clavier à présent, mes yeux commençaient à piquer. Il me fallait une petite pause, et même si le mug de café me faisait envie, je devais me montrer raisonnable. Et alors que je quittais ma chaise, Riley se précipita vers moi, dehors la pluie se mit à tomber. Violentes, véhémentes et poussées par le vent, des dizaines, puis des centaines de gouttes vinrent s'écraser contre la grande fenêtre de mon salon. Pourtant, aujourd'hui, il faisait beau, il faisait chaud. Délestant la préparation de mon thé, je ne pus résister bien longtemps à l'envie d'ouvrir la fenêtre juste pour avoir le plaisir de sentir la pluie s'écraser sur mon visage, Riley en fit de même. Au loin, l'orage grondait déjà tandis que le vent chaud me caressait le visage. L'odeur du béton humide que le soleil avait chauffé toute l'après-midi me remonta jusqu'aux narines. Un premier éclair déchira l'horizon me faisant sursauter tant, je n'y étais pas préparé, Riley non plus au vu du sprint qui le mena sous la table. Quel beau spectacle, trop pour être ignoré. Toutefois, pour m'éviter une inondation, je préférais refermer la fenêtre avant de revenir sur mes pas pour récupérer mon mac. Je voulais continuer à savourer le spectacle de cette nature soumise aux éléments. C'est donc assis sur le rebord légèrement humide de ma fenêtre, que je reprenais l'écriture, éclairé par les éclairs de plus en plus fréquents et bercé par l'orage et la pluie de concerts. Dans le pire des cas, j'avais toutes une réserve de bougies parfumées.

Mais dire quoi ? Que malgré les apparences, au fond de moi, j'étais brisé, que j'étais tout bonnement incapable de faire le deuil de mon père. Il y avait une part de vraie dans ce récit. C'est une foutue crise cardiaque qui a emporté l'homme qui a fait de moi ce que je suis. On sait que nos parents sont appelés à partir avant nous, c'est dans l'ordre des choses, mais je n'étais pas prêt, pas de cette façon, pas sans la possibilité de lui dire au revoir. C'était trop dur à accepter, autant que ça devait l'être pour ma mère. Mais croyez-le ou non, je n'étais pas en colère, pas encore et à ce moment-là, je n'aurais très certainement pas cédé aussi facilement à Sally et à Los Angeles. Non, à cette époque et lorsque j'enterrais mon père, seule la tristesse prédominait. Il ne pleuvait pas le jour où je lui ai dit « au revoir ». Le déluge s'est abattu bien plus tard, lorsque par un malheureux hasard, en triant les affaires de Jack, j'ai découvert, quelques courriers de l'hôpital. Poussé par la curiosité, je les ai lues. Et c'est là qu'on se dit que la vérité fait mal et que parfois l'on préféré s'en passer. Oui, fermons les yeux, oublions ce qu'on veut oublier. La page blanche, il n'y a que ça de vrai. Manque de bol, ma page à moi n'était pas blanche, mais emplit d'un vocabulaire qui m'échappait, de termes techniques et médicaux barbares, tachycardie ventriculaire, IDM, fibrillation ventriculaire. Une sacrée collection de pépins que ma mère gardait jalousement pour elle. Il allait mal et savait que son avenir s'écrivait sur des pointillés. Moi, j'allais bien et j'ignorais que cet homme que j'aimais comme mon père, allait s'en aller sans emporter avec lui dans la tombe, son dernier secret. Son semblant de testament se trouvait sur un bout de papier, un brouillon inachevé puisqu'il ne subsistait que ces quelques lignes. Je me souviens encore de chaque mot, à la virgule près et je me demande sans cesse s'il avait l'intention de me transmettre cet écrit.

« Je voulais avant tout te transmettre de belles valeurs, te donner l'amour dont un enfant a besoin, être le père que tu méritais d'avoir. Je voulais tant de choses pour toi et je continue à les vouloir. Le temps est une donnée un peu plus aléatoire pour moi maintenant. Je t'ai aimé et je continuerais, ou que je sois, de t'aimer comme mon propre fils. Les liens du cœur sont bien plus puissants que les liens du sang. Je le sais... »

C'est à ce moment très précis que ma vie a basculé. J'étais en colère, une phase du deuil, pour la plupart, mais pas pour ma mère qui avait compris que son secret n'en était plus un. Il ne m'aura pas fallu longtemps par la suite pour accepter de quitter New-York sans un égard pour ma mère.

Il me fallait une autre pause, non pas que je fatiguais, mais me livrer de la sorte, même à l'écrit, n'était pas chose aisée. Cette histoire était mon fardeau, le secret que je partageais avec ma mère. Sally elle-même ignorait que Jack Hamilton n'était pas mon père. Elle devait sûrement s'imaginer que je gérais mal le deuil et quelque part elle n'avait pas tort. Je gérais mal le deuil, la vérité, ma vie. Poussant un long soupire, je fixais l'horizon. Il était trois heures du matin, l'orage cessait peu à peu de se faire entendre. En posant le regard sur le panier de mon chien, je ne pus que constater qu'il avait déserté le dessous-de-table, pour un peu plus de confort. Il dormait à point fermé et pour une fois, j'étais bien décidé à suivre son exemple.


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