L'on ne badine pas avec le français

L'on ne badine pas avec le français

ft Shawn Anton Whanau

Sunny mon ange dépêche-toi ! On va être en retard ! Cette phrase au combien anodine pour tout parent qui se respecte, je la savourais différemment. Peut-être était-ce dû à la fréquence de nos retrouvailles. Il est vrai que depuis le divorce et le jugement prononcé six ans plus tôt, en plus de perdre une bonne partie de mes droits paternels, j'avais notamment perdu la possibilité de voir ma fille quand je le voulais. Sally toujours avide de vengeance, ne m'autorisait pas plus d'une semaine lors des vacances ainsi qu'un weekend par mois. Ce qui est bien peu, j'en conviens, trop pour voir la petite continuer à grandir et se mouvoir dans l'adolescence. Je savoure donc chaque moment qui nous ait offerts. Et preuve que le karma consent à me caresser dans le sens du poil, cette semaine, fait exceptionnel pendant la période scolaire, Sunny est à l'appartement. Sa morue de mère étant en déplacement et certainement à contre-coeur, je suis devenu sa seule solution de repli. J'aurai pu refuser, juste pour le plaisir de l'emmerder, mais il était question de Sunny et pour elle, je ne devais me rabaisser à cela. Je profitais donc de cette semaine improvisée avec mon petit rayon de soleil, qui malgré mes efforts, restait encore sur la réserve. La crise d'adolescence, me disais-je naïvement pour tenter de me dédouaner d'une quelconque responsabilité quant à ce désamour plus que naissant. Sally devait, à n'en pas douter, s'en donner à cœur de joie, pour me rabaisser face à Sunny, pour lui raconter tout et n'importe quoi pour continuer à redorer l'image du parfait connard infidèle à qui faire confiance était une erreur. Et dire que moi, de mon côté, je tachais de ne pas mêler notre fille à ce marasme de rancœur et de haine. Mais passons, peut-être qu'avec des efforts, je parviendrais à passer outre et à regagner la confiance de mon petit soleil qui représentait tout ce que j'avais de plus précieux.

"-Sunny ma puce ! " réitérais-je après avoir avalé mon fond de café et débarrassé la table sur laquelle nous venions de prendre notre petit-déjeuner. Mon adolescente râleuse, sac sur le dos, enfila sa paire de basket fétiche puis sa veste, me faisant savoir à son tour avec empressement, qu'elle était prête. Il ne m'en fallut pas plus pour me ruer sur ma veste en jean et pour la suivre, avec mon chien Riley vers l'extérieur. Curieusement, mon berger australien, contrairement à moi, recueillait de la part de ma fille, plus d'empathie. Il lui rendait le sourire, c'était déjà ça. Nous prîmes donc la direction du lycée, où selon les instructions de Sunny, je devais la déposer un peu avant la grande porte. Cependant et me fichant de la véhémence dans le propos, une fois garée, je quittais le véhicule pour l'accompagner sur les premiers pas. "- Oui, je sais que je te saoule, mais c'est comme ça, il faut t'y faire. On est jamais trop prudent, même sur quelques mètres. Et rassure-toi, je ne vais pas t'accompagner jusqu'à la porte." En effet, j'avais prévu de m'arrêter au niveau du parking réservé au personnel de l'établissement. Et c'est non sans un léger pincement au cœur, que je laissais Sunny s'éloignait pour rejoindre ses amis, sans un regard pour moi. Je m'apprêtais de ce fait à tourner les talons, mais quelqu'un s'approcha de moi. Redoutant qu'il ne s'agisse d'un paparazzi avide de révélations croustillantes sur mon ex-femme, j'entreprenais déjà de cacher mon visage, jusqu'à me rendre compte, qu'il ne s'agissait non pas d'un rapace, mais d'un homme lambda. "- Ah pardon, veuillez m'excuser, je vous ai pris pour un paparazzi"  lançais-je aussitôt curieux cependant de savoir pourquoi il m'apostrophait. "- Je peux faire quelque chose pour vous ?"


 

L'on ne badine pas avec le français

ft Shawn Anton Whanau

J'aurai tant aimé partager un peu plus qu'un « bonjour » et quelques mots bredouillaient dans le vide. Je redoublais d'efforts pour lui faire plaisir, ce n'était pas faute d'essayer, mais je voyais bien que c'était peine perdue. Mon adolescente se murait un peu plus dans la distance et le silence. Nous ne partagions plus grand-chose et à mesure que le temps passait, je me sentais de plus en plus inutile. J'étais même prêt à parier qu'elle attendait le retour chez sa mère avec impatience. Une mère qui lui donnait tout, une mère qui la faisait sourire, une mère qu'elle aimait et dont elle était davantage fière que son géniteur à qui elle ordonnait de ne pas franchir la limite du parking de peur d'être vu avec les copines. Bon, oui, peut-être que j'exagère un peu, toujours, est-il qu'elle refusait que je m'approche de trop près de l'entrée de l'établissement et nul besoin d'être parano, pour se demander s'il n'y a pas derrière cette demande, un sentiment de honte, ou l'envie de ne pas être vu avec moi. Il faut vraiment que j'arrête de me faire des films, je m'enfonce dans un pseudo-marasme de père culpabilisant de ne pas avoir été compétent alors que dans le fond, on ne m'a pas tellement laissé le choix. Et me voilà en train de la regarder s'éloigner avec son groupe de copines, sans un regard pour moi. Cette petite me fend le cœur parfois, là-dessus il n'y a pas à dire, elle tient de sa mère.

Je m'apprêtais donc à mettre les voiles toujours en compagnie de Riley qui suite au départ de Sunny, était repassé sur le siège côté passager. Cependant, je ne semblais pas en avoir fini avec ma fille, puisque son prof de Français venait de faire irruption. N'étant pas le parent référant, il aurait été logique que je lui indique qu'il fallait s'adresser à sa mère pour les problèmes scolaires, mais je ne saurais dire pourquoi, aujourd'hui, plus qu'un autre jour, j'avais envie d'être présent, de me sentir utile et de ne pas juste être le joueur assit sur le banc, que le coach n'enverra de toute façon, jamais sur le terrain. « - Ah ok enchanté Mr Whanau. Vous avez toute mon attention si c'est important. Mais rassurez-moi, ce n'est pas grave hein ? » Moi-même ayant été un ado, je ne connaissais que trop bien les situations de crises, pour en avoir généré quelques-unes à l'époque. Ce n'était pas grave, mais suffisamment important pour qu'un voir plusieurs enseignants ne convoquent mes parents, mon père la majorité du temps... du moins celui que je pensais être mon père. Mais soit, passons ! Pour l'heure, il était question de Sunny. Son professeur, qui semblait investi, plus que la plupart de ses collègues, commença à me faire savoir des choses que j'ignorais de toutes évidences.

« - Écoutez, pour ne rien vous cachez, je n'ai que très peu Sunny, d'ailleurs en général ce n'est pas sur les périodes scolaires. Là, c'est exceptionnel, sa mère est en déplaçant. D'ailleurs, c'est elle son parent référent donc j'imagine que c'est à elle que le prof principal s'est adressé. Bien que de vous à moi, je souhaiterais évidemment participer aux discussions à venir. » J'étais quelque peu mal à l'aise, presque contraint d'admettre une défaillance qui n'en était pas une. Sally avait gagné le procès et la garde exclusive de Sunny, c'était donc elle et son armée d'avocats qui avaient fixés les modalités. Je ne pouvais voir ma famille qu'un voir deux week-ends par mois et durant les vacances scolaires. C'était bien peu, mais au moins, je pouvais encore la voir. Mr Whanau, qui continuait à m'exposer la situation, me proposa gentiment de nous mettre dans un endroit plus calme pour discuter. Je ne pus m'empêcher de lui sourire, c'était bien la première fois qu'on me traitait avec autant de bienveillance depuis que Sunny était scolarisée ici. « - Oui avec plaisir, je vous suis dans ce cas. »

J'acceptais donc de suivre l'enseignant à l'intérieur du lycée, pas sûr d'aimer ce que j'allais entendre sous peu, mais tant pis, j'avais accepté de m'investir et je devais l'assumer dès lors. Nous nous retrouvâmes donc dans, ce que je pense être la salle de classe de Mr Whanau où nous prîmes place. « - Ok, je vous écoute alors, parlez-moi de Sunny ! » Et c'est effectivement ce qu'il fit par la suite en exposant son appréhension quant à la baisse très significative de la moyenne générale de mon petit soleil. « - Ah oui effectivement je comprends mieux pourquoi son professeur principal sollicitait une rencontre. Pour être franc avec vous, j'ignorais tout ça, parce que comme je vous l'ai dit, je n'ai pas la garde de ma fille et on ne peut pas dire que niveau communication, ça soit le pied avec sa mère. Ce que vous me dites est préoccupant, tellement que je crois qu'il faut que je sorte de ma réserve. J'ai envie de vous dire que les amourettes d'adolescentes peuvent entrer en compte, elle a un copain et j'imagine qu'elle a sûrement la tête ailleurs. Après, j'imagine que sa mère est parfois, voir souvent amené à bouger pour ses tournages et que du coup, le suivi des devoirs n'est pas tip-top. Je veux bien essayer de lui parler, mais à tous les coups, je ferais face à un mûr. Je ne suis pas démissionnaire hein, c'est juste que ça n'est pas facile de la voir aussi peu et de n'être là que par intermittence dans sa vie. Qu'est-ce que vous me conseillez ? »


 

L'on ne badine pas avec le français

ft Shawn Anton Whanau

Se retrouver dans une salle de cours, me rappela toute une flopée de souvenirs. Bons comme mauvais, je ne pouvais nier l'impact de cette période sur ma vie et ce qu'elle m'inspirait encore lorsque la nostalgie accaparait ma tête de temps à autre. Ni un cancre, ni une tête d'ampoule, j'oscillais encore le bon et le moins bon selon les matières et selon ma motivation. D'ailleurs, je me souvins avoir moi-même étudier le français en langue vivante. Ma mère y tenait étant française d'origine et j'imagine que pour lui faire plaisir, je ne me suis pas laissé le choix. Les années ayant passé et mon niveau de l'époque étant déjà médiocre, je n'étais aujourd'hui plus capable d'honorer les ancêtres de ma mère et je m'en foutais pas mal à bien y réfléchir. C'est une histoire compliquée ! Mais revenons à nos moutons. La salle de classe était propre, parfaitement rangée et d'une quiétude presque apaisante, bien qu'à l'extérieur, l'agitation dans le grand couloir, soit palpable. Les mains jointes, je me surprenais à être dès plus attentif face à l'enseignant pourvu de bons conseils, il est vrai. « - Oui j'imagine que vous avez raison. C'est ma fille, et même si nous nous voyons que trop peu, je dois quand même jouer mon rôle sans concession. » Oui et ne pas juste me contenter d'être le remplaçant sur le banc de touche, attendant un signal qui ne viendrait jamais.

« - En tout cas merci à vous de prendre sur votre temps. » Oui, c'est vrai, même si je me sentais un peu honteux et confus d'être ici, il était important pour que je garde bonne figure, de remercier l'enseignant. Les choses étant posées, je pensais naïvement mettre les voiles et tenter de réfléchir à une solution à cet épineux problème, cependant Mr Whanau ne semblait pas en avoir fini avec moi. Preuve que les enseignants sont de fins observateurs, il me posa ce qui me sembla être une question polémique. Ma relation avec Sunny ? Un sujet que je préférais taire et ne garder que pour moi, histoire de ne pas apitoyer un potentiel interlocuteur, mais plus encore pour ne pas reconnaître mon échec. Les mâchoires crispées, je décroisais à présent mes mains avant de poser mon regard sur ce qui était affiché sur le mur. La diversion étant pourrie, il fallait me résoudre à éluder non pas un mystère, mais une question à laquelle je n'avais pour ainsi dire aucune réponse précise à fournir. « - Le statut « compliqué » est le plus adéquat pour résumer la chose. Vous savez, c'est une ado et à cet âge la discussion ce n'est pas leur point fort. » À mon tour, je lui rendis son sourire compatissant, surpris de me sentir plus à l'aise que je ne l'étais quelques minutes plus tôt. L'enseignant ne me jugeait pas, une bienveillance qui m'avait fait défaut à de nombreuses reprises avec certains enseignants qui ne traitaient qu'avec l'autre morue, sans même prendre le temps de m'inclure dans l'équation. « - Oui c'est logique qu'il faut que je lui parle, mais vous voyez, j'ai peur de la braquer encore plus. C'est idiot hein ? Je suis son père et j'ai souvent l'impression d'être un étranger pour elle. Mais parfois et c'est tellement rare que je tente d'en profiter tant que je peux, il y a des petites accalmies. J'ai même accepté d'aider son copain à se perfectionner à la guitare pour qu'il puisse jouer sur la scène ouverte de mon bar. Certes, il n'est pas trop mauvais, mais c'est surtout pour avoir ses bonnes grâces que j'ai fait ça. C'est pathétique non ? »

Oui pathétique me semblait être le bon mot, mais je doute que le prof de Français de Sunny atteste. Il voulait m'aider, c'était évident. Une aide que Sally aurait rejetée à n'en pas douter. D'ailleurs, en parlant du diable, mon interlocuteur, qui n'avait de toute évidence pas encore, était confronté au monstre, me proposait également de discuter avec, une alternative inenvisageable. « - Pardonnez-moi de paraître condescendant, mais si c'est vraiment le conseil que votre collègue va me donner, autant ne rien dire. Je n'ai pas parlé avec mon ex-femme depuis six ans. Le seul contact que j'ai, c'est avec son assistante, qui elle non plus ne me porte pas vraiment dans son cœur. » Mais par chance, aujourd'hui, je faisais face à quelqu'un de concilient qui semblait vouloir me tendre une perche. D'ordinaire et par fierté, je me serais abstenu de la saisir, mais il ne s'agissait pas de moi, mais belle et bien de Sunny et pour ma fille, j'étais prêt à faire des concessions. « - Je ne vais pas la lâcher non plus. Je l'ai cette semaine, je vais en profiter pour entrevoir une once de conversation avec elle. » Et j'avais bien l'intention de le faire, ce n'était pas simplement des paroles en l'air juste pour me tirer au plus vite. Non, cette fois, j'étais prêt à jouer mon rôle de père. Il me tendit alors son numéro sur un bout de papier et je n'eus rien de mieux à lui donner en échange, qu'une vieille carte de visite qui traînait dans le fond de ma veste. « - Et moi, je vous laisse ma carte. Les horaires d'ouvertures sont à l'arrière si jamais vous aimez siroter une bonne bière tout en écoutant de la bonne musique. On fait scène ouverte le week-end. En tout cas, je vous remercie. Vous n'étiez pas obligé de prendre sur votre temps. Dommage que les enseignants ne soient pas tous investit comme ça ! C’est empêcherait les gamins de décrocher où les parents de s’en foutre pour la plupart »



 

L'on ne badine pas avec le français

ft Shawn Anton Whanau

À l'époque où c'est moi qui foulais le couloir du lycée avec un cartable sur le dos, les enseignants se fichaient pas mal de voir l'une de nos moyennes diminuaient. En fait, aussi loin que je m'en souvienne, c'est Mr Davis, qui gérait l'option musicale, qui se souciait le plus de nous, alors qu'il n'était ni notre prof principal, ni l'enseignant pourvu d'une matière à fort coefficient. Mais il s'intéressait vraiment à nous, à ce que nous étions, à ce à quoi, nous aspirions. Il était évident qu'il aimait son job, autant que la plupart de ses collègues. D'ailleurs, j'étais prêt à parier qu'il était, à chaque fois, le dernier à quitter sa salle de classe. Le plus triste dans cette histoire, c'est que nous, nous ne le connaissions pas tant que ça finalement. Et avions-nous vraiment cherché à le faire ? Probablement pas et c'est fort dommage, quand on y repense avec du recul. En fait, je crois que les professeurs, pour les élèves, sont des êtres inaccessibles, qui de par leur statut de pédagogue, semblent exempte, selon les élèves, d'une vie normale. Oui, j'avoue que poser comme ça, l'argumentent est un peu pourri, mais à mon sens, l'adolescent ne va pas chercher plus loin. Le prof est un prof, rien de plus. Et en voyant Mr Whanau, je me dis que les gamins doivent penser pareil. C'est bien dommage ! J'aurais vraiment apprécié avoir un prof comme ça, c'est sûr ! C'était un gars bien, je pouvais le sentir à sa façon de s'exprimer, il était très patient et à l'écoute. Des qualités indispensables s'il était amené à rencontrer Sally, si cette dernière consent toutefois à se dégager du temps pour l'éducation de notre fille. Ce qui me parait difficilement envisageable avec son emploi du temps de ministre... Non, pardon de star congratulée par les yeux du monde entier. Oui, je m'égare à nouveau, c'est incontestable.

« - Non mais vraiment, j'insiste sur mes remerciements. Loin de moi l'idée d'enfoncer la profession, mais j'ai vraiment l'impression que pas mal d'enseignants s'en foutent un peu. Après, peut-être que j'exagère et que jusqu'à présent avec Sunny, il n'y avait pas matière à s'en inquiéter. Toutefois, je suis d'accord avec vous, l'adolescence n'est pas un cadeau. » Ayant parfois mené la vie dure à « mes parents » j'en savais quelque chose. Il m'avait toutefois fallu attendre mes dix-sept-ans pour commencer à faire preuve d'un peu plus de maturité et d'arrêter de flâner pour reprendre les études abandonnées au préalable pour aider Jack dans son entreprise de rénovation. Mais je doute que Sunny se calme de sitôt si vraiment elle était en crise. Mais en crise de quoi ? Si Whanau ne me trouvait pas pathétique, moi à l'inverse je me sentais tellement con, de ne pas être capable de savoir ce qui pouvait travailler ma fille. Je ne faisais qu'émettre des hypothèses, sans aucune certitude. Je ne connaissais pas ma fille, ça, c'est tellement pathétique. Mais ne voulant pas jouer davantage les victimes, je gardais ça pour moi. Il avait raison, il fallait mettre en exergue mes tentatives de rapprochement, plutôt que le négatif. Car il est vrai, malgré le manque de temps au vu des courts séjours de Sunny chez moi, que je faisais au mieux pour lui montrer que j'étais là, qu'elle pouvait me parler.

« - Je tâcherais d'appliquer vos conseils » lançais-je pour ne pas trop m'attarder sur le sujet de l'ex-femme. J'ignorais comment elle élevait notre fille et c'était plus que tentent de la discréditer, faisant ainsi d'elle l'unique responsable au problème, si problème, il y avait, mais en agissant de la sorte, je ne valais pas mieux que la morue. La conversation se ponctua par l'échange de numéro et carte de visite, agrémenté par une poignée de main bien virile. « - Oui passez donc avec vos enfants, je paierais une tournée ! Prenez soin de vous également et si j'ai le moindre souci, je ne manquerai pas de vous contacter » Et me voilà en train de quitter la salle de classe, plus serein. J'espérais que le problème se résorbe, ou dans le meilleur des cas, j'espérais trouver une solution avant le départ de Sunny, j'étais loin de me douter que d'ici quelques jours, le numéro de portable de Mr Whanau me serait utile et qu'une fois encore, la « rumeur » polluerait mon existence.

Quelques jours s'étaient écoulés, sans que je ne trouve le bon moment pour converser avec Sunny de la baisse de ses notes. Quelques jours propices à ce que je qualifierais d'emmerdes. Une fois n'est pas coutume, mon portable vibra au son de la notification de la Bitch. Oui, je sais, venant de moi, être détenteur d'une telle application, c'est l'hôpital qui se fout de la charité. Mais je voulais savoir, je voulais comprendre. Peut-être que cette personne était à l'origine de la vidéo et des rumeurs, bien qu'à l'époque de mon infidélité présumée, cette foutue application n'existait pas. Je pris donc le temps de consulter mon écran et qu'elle ne fut pas ma surprise en découvrant le prénom de Sunny. Je me foutais de la fin du ragot, ce qui m'importait concernait ma fille. Bien sûr, ce n'était qu'une rumeur et y consentir serait abusé au vu de mon passif. Cependant, je ne pouvais m'empêcher de songer à la chute de notes. Nous étions soit dans un mauvais timing, soit confronté à un vrai problème. Et c’est armé du numéro de Shawn Whanau que je comptais essayer de le régler, ce foutu problème.




 

L'on ne badine pas avec le français

ft Shawn Anton Whanau

L'adolescence est une période difficile, Mr Whanau avait raison et puis l'ayant vécu tous les deux, j'imagine que nous étions plus à même de comprendre le sujet. De mon côté, j'en avais fait voir de toutes les couleurs à mes parents, bien que cela soit sur une courte période. Et je suppose que pour les demoiselles, c'est encore une autre histoire. Elles sont plus sensibles, plus délicates, plus amoureuses. Leurs sentiments exacerbés pourraient de ce fait, induire quelques changements venant ébranler n'importe qui sans exception, même la première de la classe. Après tout, ne dit-on pas que personne n'est parfait ? De vous à moi, ça m'emmerde de devoir reconnaître l'imperfection de ma petite princesse. Étant mon petit bébé, elle était et demeure encore par nature parfaite, hashtag flagrant délit de manque d'objectivité. Ok, je vais me faire soigner... À ce moment-là, lorsque je rejoignis ma voiture, j'étais empli de bonnes volontés et bien décidé à jouer le mieux possible ma partition paternelle. Les conseils du prof étaient bons, suffisamment pour que je les applique à la lettre. À sa façon, il m'avait prouvé qu'en étant à l'écoute et pourvu de bienveillance, une discussion alimentée par un sujet désagréable, surtout pour un père poule, pouvait devenir agréable et délesté de la moindre tension. Il fallait simplement trouver la bonne intonation, les bons mots. Oui, la bonne volonté, je l'avais, sauf que par la suite, aucune conversation avec Sunny n'a eu lieu et me voilà présentement à scruter l'écran de mon téléphone. La bitch venait une fois n'est pas coutume, de déverser son venin. Bien sûr, comme la plupart des malencontreux utilisateurs, je savais qu'une part de ses ragots n'étaient rien de plus qu'un tissu de mensonges entretenu par la bobine de cette connasse anonyme, cependant certains de ses messages étaient vrais et là est toute la perversité du truc. On ne sait jamais ce qu'on va lire et qu'elle en sera la nature. Toujours est-il qu'au vu des récents événements, dans lesquels j'inclue la chute de notes de Sunny et rien d'autres. Je préfère ne pas tenir compte des précédentes allégations de la Bitch à mon égard, ça ne ferait que me rappeler un mauvais souvenir dans une certaine chambre froide avec une personne toute aussi certaine.

Mr Whanau, avait par chance, répondu à l'affirmatif à mon texto. Je m'en voulais un peu de lui demander ça sur son temps libre, il avait sûrement, mieux à faire. Mais je devais en avoir le cœur net, quelque chose n'allait pas et peut-être que cette rumeur n'en était pas une. Je pris grand soin d'être vague dans le texto. Il faut dire que j'avais un peu tendance à être parano, depuis les dernières allégations de la Bitch à mon égard. Le coup de la chambre froide n'était connu de personne et ne pouvait l'être si ce n'est par les personnes présentes à savoir moi, Sally et mon personnel. Sally étant trop soucieuse de son image, je la voyais mal participé à ça. Il ne restait donc plus que mon personnel. Depuis ça, je restais donc sur mes gardes, sait-on jamais. Il faut toujours se méfier des apparences. Shawn fit son apparition à peine dix minutes plus tard et je ne serais dire pourquoi, mais sa présence et sa bienveillance anéantit presque aussitôt la plupart de mes appréhensions. « - Vous avez fait vite ! » ne puis-je m'empêcher de dire. Sans attendre, il prit place sur l'un des tabourets tout en me faisant savoir qu'il n'était pas loin d'où le fait de sa rapidité. J'espérais ne pas l'avoir dérangé, sinon quoi je me sentirais vraiment mal d'avoir pris sur son temps de récupération. Mais de toute évidence, il semblait toujours enclin à la bienveillance, preuve que je n'abusais pas. Je fus également ravi que nous ne passions pas par diverses formules de politesse, lui aussi étant du genre à aller droit au but. « - Je n'ai pas oublié que je vous dois un café ! » lançais-je avant d'observer les alentours. Il n'y avait personne à proximité, un constat qui m'amena à sortir mon portable et à le tendre à Shawn pour lui faire lire la parution de la Bitch concernant Sunny. « - Je ne suis pas doué avec tous ces trucs, mais j'ai quand même réussi à faire une capture d'écran, je m'en félicite »


« - J'essaie de passer outre lorsque je suis évoqué, mais j'ai du mal à me contenir lorsque ce truc parle de ma fille. Je sais mieux que quiconque ce que peut faire la rumeur, mais là, je dois vous avouer que je doute. Si l'on prend en considération la chute de notes, il y a de quoi douter non ? Vous ne l'auriez pas vu faire des trucs étranges ces derniers temps ? Et au niveau de ses fréquentations, elle est bien entourée ? » Et je me rendis compte par la suite et bien malgré moi, que j'en faisais trop une fois encore « - Vous savez quoi ? Je vais vous préparer un café. Je crois que cette histoire est en train de me rendre un peu parano. Elle vous a déjà cité vous ? »