The guy next door || Orion

Lorsqu’Aiden avait demandé à son voisin s’il avait joué dans une oeuvre connue, il s’attendait à ce que la réponse inclut des titres de films qu’il connaissait, voire même qu’il avait déjà vu. Maintenant qu’Orion lui faisait cette liste, il se surprenait à se demander pourquoi il avait eu l’audace de croire une chose pareille. Non pas qu’il ne connaisse pas les pièces que l’homme venait de citer, au contraire, mais il n’était pas le genre d’homme à passer la soirée au théâtre et il aurait juré que ça se voyait au premier regard. Il était un cliché du parfait petit soldat américain après tout, pas vrai ? Pas assez intellectuel pour ça. Il eut envie de rire, mais se retrouva finalement à poser son regard perplexe sur l’homme en hochant imperceptiblement la tête comme s’il lui disait qu’il voyait parfaitement, alors qu’il en était très loin. La suite fut plus étrange encore. Un instant, le soldat regarda l’homme jouer du piano en fronçant les sourcils. Après quelques secondes, il dut bien admettre que c’était plutôt sympa. Il avait une préférence pour la musique un peu plus rock, mais bon. “Eh bah, j’aurais jamais deviné que vous saviez vraiment chanter en me basant uniquement sur vos vocalises.” lança-t-il quand le silence retomba et que le musicien lui fit de nouveau face. Il souriait et il n’y avait pas vraiment de méchanceté dans sa voix. Ça n’était qu’une petite pique envoyée comme ça, probablement qu’ils n’étaient pas suffisamment proches pour en arriver là, mais il fallait bien commencer quelque part. “On va quand même poursuivre sur l’idée d'insonoriser l’endroit, même si c’était pas mal.”

Il faisait un vrai effort là, non ? Il ne croyait toujours pas qu’ils s’échangeraient des bracelets d’amitié dans l’immédiat, mais Aiden se sentait beaucoup moins agacé qu’en entrant dans cet appartement. Il en avait même oublié son envie de faire une sieste qui puisse durer des heures, peut-être même des jours. “Pourquoi ne pas avoir tenté une reconversion dans le cinéma ?” demanda-t-il avant de réaliser et de pouvoir s’en empêcher. S’il continuait comme ça, Orion finirait par croire qu’il en avait réellement quelque chose à faire. Pire encore, qu’il puisse être gentil. “On est à Hollywood, la concurrence est peut-être forte, mais y a de quoi faire. J’vous vois bien dans un épisode de NCIS ou un truc comme ça… Dans le rôle d’un suspect, évidemment.” Il trouva une réponse à sa propre question tout seul, comme un grand, juste après l’avoir posé. Ou peut-être qu’il avait juste trop d’à prioris sur les gens, ça n’aurait pas été totalement impensable. “C’est le côté hollywoodien qui n’est pas à la hauteur du star de Broadway ?” demanda-t-il tout de même, un sourcil relevé comme s’il mettait l’homme au défi d’admettre ses propres préjugés. Il était bien le type prêt à engager quelqu’un pour poser des plaques de mousse sur ses murs pour insonoriser la pièce, après tout. Et il avait admis lui-même être snob, donc ça semblait cohérent. Cela dit, Aiden n’était pas tout à fait convaincu que finir sa carrière à enseigner à des gamins pas forcément motivés et loin d’être sérieux soit une meilleure chose. Sur la totalité des élèves inscrits à son cours, combien finiraient par utiliser ses enseignements dans la vraie vie ?