L'école aux cauchemars + Aaron, Cassandre, Aslan

Visiblement, Cassandre n'en a que faire de ton geste puisqu'elle t'ignore, purement et simplement. Quelque peu outré, la bouche dessinant un "O" d'étonnement, tu te relèves alors et suit la petite troupe une fois que l'énigme mathématiques est résolue. Ce nouveau genre de bureau, tu n'en étais pas très adepte dans tes années lycées. Petit gamin intello du coin, tu le fuyais et il te le rendait bien. Les yeux plongés dans les ombres causées par la lune, la main courant sur le bois du bureau central, tu es celui qui trouve le papier et le lit à voix haute. Puis, sans pouvoir te contenir, tu le froisses et le jette à la poubelle. C'est quoi encore ces conneries... Faut qu'on se tire dans les pattes maintenant ? Alors quoi, c'est un jeu organisé par la Bitch ce truc ?

Le fait est que ça te fout assez hors de toi, cette situation. Même si jusqu'ici tu avais pu trouver un peu d'amusement et de jeu à tout ça - malgré le mauvais goût certain - là, c'était trop. Le "maillon faible", qui celui à laisser pour compte... L'idée te donnait envie de vomir, mais il fallait l'avoue, c'était en grande partie parce que tu avais l'impression que ce déchet de la société, c'est toi. Bon, écoutez, moi j'ai jamais fini mes études, je bosse depuis que j'ai 16 ans, alors si "maillon faible" c'est pour parler de celui qui a pas le niveau d'éducation le plus haut, on vote pour moi. Tant qu'on sort d'ici... Puis tu époussette le rebord de la chaise en décomposition avant de t'y asseoir en attendant patiemment que tout ce barda se termine.

Le risque était payant, même si j'avais grandement hésité entre mettre un 0 ou un 5 derrière le 1 qu'Aslan avait déjà pu commencer à mettre. Mais de toute évidence, j'avais raison puisque la porte s'ouvrait sur ce qui était en théorie la dernière pièce de ce plan machiavélique : le bureau du directeur. Mais si la pièce n'a jamais été très accueillante, elle parait lugubre, notamment parce qu'il n'y a presque pas de lumière à l'intérieur, seulement celle d'une pleine lune qui filtre à travers les rideaux. Et les ombres que l'on peut voir ne sont clairement pas rassurante, pas du tout même. C'est la seule pièce qui fait vraiment peur depuis le départ. La première était angoissante parce qu'on ne savait pas ce que nous faisions là, mais à part les carcasses de porcs, il n'y avait rien de vraiment apeurant. La deuxième non plus si ce n'est l'énigme et le compte à rebours. Je ne sais pas où se trouve l'énigme dans cette pièce, il ne semble rien y avoir aux murs. C'est Aaron qui trouve le bout de papier sur le bureau. Il le lit à voix haute, mais cela reste étrange. Un jeu organisé par la Bitch ? Cela se pourrait bien effectivement. Aaron n'est pas content mais il finit par donner une théorie qui tient la route, le maillon faible c'est lui, car il n'a pas fini ces études. Cela me convient.

" Oui, cela me semble logique vu comme ça. Je vote pour toi Aaron, désolé. "

Mais au moins, si cela pouvait se finir rapidement ce serait mieux. Après, peut être que le maillon faible, c'était moi. Pourquoi ? Parce que je suis la seule fille du trio. C'est machiste, mais ça pourrait refléter une autre logique, nous verrons bien. Restez à voir ce qu'en penserait Aslan.

La porte s’ouvrit dès que Cassandre compléta le chiffre au tableau, et Aslan lui adressa un sourire reconnaissant. Il était définitivement tombé dans la bonne équipe.
Mais ils n’étaient pas sortis de leurs peines pour autant ; il fallait continuer. Un frisson lui parcourut l’échine en arrivant dans la dernière salle. Les bureaux des directeurs se reconnaissaient toujours entre mille ; et les souvenirs l’envahirent. A l’époque où il était scolarisé au Suriname, il n’avait jamais été convoqué dans ce genre de pièces ; mais la donne avait nettement changé quand il était arrivé aux Etats-Unis et qu’il avait décidé de se rebeller. On l’avait surtout convoqué pour parler de ses mauvaises notes et pour lui demander d’arrêter de se borner à répondre en néerlandais en faisant si peu d’efforts pour apprendre l’anglais, mais ça avait été parfois encore bien moins glorieux. Et puis, la dernière année de lycée, il était soudainement rentré dans le rang et le directeur s’était plutôt inquiété de savoir si les rumeurs qui le disaient foutu dehors de chez sa mère étaient vraies – doté d’une fierté mal placée, Aslan avait toujours nié. Il était tout aussi bien à squatter chez son meilleur ami, de toute façon.
Faisant le tour du bureau, il redressa la tête en entendant Aaron se proposer comme maillon faible, puis Cassandre confirmer. Peut-être qu’il aurait dû se taire et accepter, qu’ils puissent sortir de là rapidement. Oui, peut-être. Mais c’était plus fort que lui, il ne pouvait pas laisser le jeune homme se salir pour rien alors qu’il lui semblait évident qu’il avait le passé le moins reluisant. « Petit joueur, sourit-il. Ancien drogué à l’héro, je pense que c’est pas exagéré de considérer que je suis un bon maillon faible à vie. » Après tout, rien ne disait qu’il ne retomberait pas dans ses addictions un jour ; il s’était bien prit une cuite récemment alors qu’il s’était promis de ne plus jamais boire non plus. Son regard croisa un instant celui de Cassandre, il baissa les yeux. Il aurait pu s’étaler aussi sur son passé de SDF puis sur le jour où il avait levé la main sur la cousine de la jeune femme, mais c’était probablement inutile de raviver ce genre de souvenirs.

Tu ne peux pas te retenir de rire. Cassandre enfonce un peu plus le clou sur ta vie, même si c'est toi qui l'a proposé à la base, tu réalises ainsi à quel point elle est bien différente de son frère qui aurait sûrement couru tête la première pour dire "Mais non, c'est moi le déchet ici". Puis derrière, Aslan enchaîne sur ses débauches à lui, et c'est le clou du spectacle. L'ironie de la situation te dépasse, vraiment, tu ne vois aucun intérêt à tout ça. Ah ! Pas mal, en effet. J'espère que ça va mieux maintenant, cela dit... Mais je comprends pas plus le but de tout ça... Je veux dire, avant il y avait un côté jeu mais là c'est juste... Se tirer une balle dans le pied.

Doucement, tu fais un tour de la pièce, cherchant une autre sortie. Allez, moi ça m'énerve, mettez le nom que vous voulez, peu m'importe. Je veux juste sortir de là. Un peu claustrophobe sur les bords, et toujours sous le choc de la première "épreuve" un peu trop sanglante pour toi, tu n'arrives pas à retenir la panique qui prend doucement place au fond de toi. D'un coup sec, tu tires sur les rideaux pour voir ce qui se trouve dehors dans l'espoir d'avoir une vue de l'extérieur et de pouvoir jeter quelque chose sur la vitre pour sortir de cet enfer qui joue avec tes nerfs...

Spoiler: