Le monde n'est pas si pourri que ça finalement

feat Dolores & Andy

Contrairement à ce que je pensais, Dolores n’était pas au courant des déboires de ma famille. C’était sans doute un peu présomptueux de croire que la Terre entière était au courant de mes soucis. Mais ça avait fait un tel bruit dans les médias et la presse que j’avais la sensation que toute ma vie privée avait été étalée aux yeux de tous. Par chance, certains n’en avaient rien à faire. Au moins je ne serai pas obligé de rentrer dans les détails et de parler de ma mère.

- Tu as eu des problèmes avec tes parents ?

Olala de quoi je me mêle. Je secoue aussitôt la tête.

- Oublie, ça me regarde pas. Quant à mon père… je sais pas. Je veux encore croire que tout ça n’est qu’un coup monté et qu’il n’est coupable de rien. Je préférerais…

Peut-être que je me voile la face. C’est sûrement le cas en fait. Mais je n’arrive pas à croire qu’il ait pu faire de telles choses sans que ma mère ou moi ne nous doutions de quoi que ce soit. En fait je ne suis pas mécontent qu’on parle d’autre chose, je préfère ne plus penser à tout ça. Dolores s’éloigne pour revenir avec des lasagnes. Mon estomac a fait un tour sur lui-même je crois tant l’odeur me donne faim. Je lorgne dessus mais fais l’effort de ne pas me jeter dessus tout de suite comme un mort de faim. Même si c’est le cas. Dolores a l’air d’être portée sur le champ. J’aimerais bien l’entendre chanter. Par contre j’ai du mal à comprendre cette histoire de physique. Bien qu’elle ne serait pas mannequin – il faut vraiment être filiforme pour ça, on aime ou on aime pas – elle était loin d’être vilaine, au contraire. Et ce n’était pas pour me déplaire. J’avais toujours eu un peu de mal avec mes collègues mannequins. Pas de formes, pas de sourire… C’est d’un chiant. Enfin au moins elle a l’air d’aimer ce qu’elle fait, c’est déjà ça. Moi non plus je n’aurais pas pu faire mannequin toute ma vie.

- Profite ! Si t’as du talent, je suis sûr que tu trouveras une autre façon de l’exploiter. J’aimerai bien voir ce que tu fais ou t’entendre chanter. Parfois, il ne faut pas trop penser au lendemain. Je t’avoue que je ne sais pas ce que j’aurais fait après mon métier de mannequin. Spéculer sur les transactions financières, ce n’est pas ce qui me passionne le plus. Enfin je ne me voyais pas non plus comme musicien de rue à la base…

Enfin, Dolores lance le feu vert en souhaitant bon appétit. J’attrape mon assiette pour manger une bouchée. C’est le bonheur. J’entame ma part avec un appétit non dissimulé comme si c’était la meilleure nourriture du monde puis essaie de me calmer un peu pour ne pas faire honte à mon hôte. Je dois avoir l’air pitoyable. Mais au moins je mange. Je n’en laisse pas une miette. Encore un peu et je léchais l’assiette…

- C’était délicieux… Merci beaucoup Dolores ! T’es une belle personne. Je crois que j’avais oublié le goût des lasagnes.

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Dolores observa Andy un long moment alors qu'il semblait un peu confus dans ses pensées. Il voulait savoir ce que Dolores avait vécu avec ses parents avant de se rétracter. Dolores ne voyait pas ce qu'elle pouvait lui dire. Chaque fois qu'elle y songeait, elle avait la sensation de se plaindre et d'attendre qu'on la chouchoute. Elle détestait être au centre de l'attention des autres si ce n'était pas pour quelque chose d'honorable. Hors, parler de son passé ne faisait pas parti des choses honorables. Il y avait peu de personnes qui étaient au courant de son enfance et son adolescence. Les seuls qui y avaient eu le droit étaient les garçons de son ancien groupe de musique. Eux seuls avaient connu la vrai Dolores, celle qui se pointait avec des marques sur le corps, celle qui avait souvent faim et n'avait pas le droit de manger si sa mère ne le lui permettait pas. Celle qui avait eu de l'amour à revendre pour ces garçons qui étaient tous devenus sa famille avant de la laisser tomber, la laissant seule à Los Angeles.

« Tu as raison, ça ne te regarde pas... Une enquête a été ouverte non ? Si c'est un coup monté, ça va se savoir un jour où l'autre... »

Enfin, il y avait longtemps que Dolores ne croyait plus en la justice. Sinon, elle aurait été arrachée à ses parents pour aller vivre ailleurs. Aujourd'hui, Dolores restait seule, ne vivant que pour le cabaret. Elle n'arrivait pas à se trouver un autre objectif de vie. Elle tremblait rien qu'à l'idée que tout s'arrête un jour. La jeune femme écoutait Andy qui semblait être de bon conseil. Cependant, elle ne savait pas trop quoi lui répondre. Sa situation était un peu similaire à la sienne au fond. La brune baissa les yeux, lui souhaitant bon appétit. Elle n'avait pas encore mangé la moitié qu'il avait déjà fini son assiette. Dolores l'observa un court instant avant de poser son assiette et de se lever pour aller le resservir. Elle revint, lui tendant son assiette avant de reprendre son repas.

« Il y a plein de petits boulots en ville tu sais... Il n'y a pas de honte à faire autre chose. Enfin, vu dans l'état où je t'ai trouvé, je pense que la honte ne te fait pas peur... » S'amusa t-elle à répondre.

Dolores termina de manger et posa son assiette, soupirant doucement en tapotant son ventre. Ça faisait du bien de manger, de se reposer dans son chez soi. Andy n'avait plus la chance de connaître ça et ça devait être difficile de passer du luxe à rien du tout en si peu de temps. Dolores glissa son regard vers Andy.

« Tu devais être populaire auprès des filles avant non ? Ça a changé ? C'est quoi qui te manque le plus maintenant ? »

Le monde n'est pas si pourri que ça finalement

feat Dolores & Andy

Je ne m’étais pas trompé, Dolores n’a visiblement aucune envie de parler de sa famille. Je comprends, c’est plutôt personnel comme sujet. Pas sûr qu’elle en parle même à ses amis proches alors à un sinistre inconnu ? Bon je lui ai sauvé la vie mais tout de même. Ca ne justifie pas qu’elle se confie. Et puis ça ne changerait rien de toute façon. Comme le fait de croire ou pas en mon père. Mon seul avis ne va pas changer sa condamnation. Il a été reconnu coupable, c’est comme ça. Je ne sais pas quoi croire. Parfois la justice se trompe.

- Je t’avoue que je n’en sais rien. Il a été reconnu coupable, les gens sont contents… Je pense que ça restera comme ça. Je dois faire avec. Ce n’est pas comme si je pouvais y faire quoi que ce soit. Mais au moins maintenant je sais qu’on doit toujours se réjouir de ce que l’on a parce qu’on risque de tout perdre du jour au lendemain. Même si j’aurais préféré l’apprendre autrement.

Oui parce que du coup c’est un peu à mes dépens tout ça. C’est mon père qui a merdé et ma mère et moi qui en avons fait les frais même s’il est en prison. J’espère juste pouvoir me relever de tout ça. Repartir de zéro n’est pas facile. Jouer de la guitare, que je ne maitrise pas, ne va pas m’aider à remonter à la surface. Il faut que je trouve autre chose. Mais l’arrivée des lasagnes me déconcentre et mon estomac remplace alors mon cerveau. Ce n’est qu’une fois l’assiette vidée que je me rappelle de ce dont on parlait. Dolores eut la gentillesse de me ramener une autre part. Ca se voit que je meurs de faim ? Je ne vais pas faire la fine bouche et je prend donc l’assiette pour continuer de manger non sans l’avoir remerciée d’un signe de tête. Trouver un boulot j’ai déjà essayé. Mais c’est bien plus compliqué que ça en a l’air. Par contre je ne sais pas comment je dois prendre sa constatation sur mon état. Mais au fond, je sais qu’elle ne fait que dire la vérité.

- Oh je n’ai plus de fierté depuis longtemps. Avoir un boulot, même minable, ne serait en aucun cas une honte. J’ai essayé. Personne n’a voulu d’un sans abri. Et puis… personne ne veut du fils Alvaro. Ceux qui m’ont reconnu m’ont presque jeté dehors.

C’est injuste. Ce n’est même pas moi le fautif mais apparemment les gens considèrent que je suis le fils de mon père. Une belle réputation non justifiée que voilà. J’observe Dolores un instant. J’ai envie de lui demander si l’endroit où elle travaille ne chercherait pas quelqu’un pour un travail. N’importe quoi. Mais je ne veux pas qu’elle se sente obligée. Elle m’a déjà énormément aidé. La question qu’elle me posa me fit sourire alors que je me remémorais le bon vieux temps. Ah ça oui, j’ai eu beaucoup de succès. Mais ça n’a pas toujours été une réussite au final.

- Je l’étais. Etre mannequin aide beaucoup. Mais au final, on n’est appréciés que pour notre corps principalement. Tu parles d’une gloire. Certaines filles qui passent dans la rue me regardent avec intérêt mais ça s’arrête là. Je vis dehors, ça n’a rien d’attirant. Et celles qui me reconnaissent… c’est déjà bien si elles ne me crachent pas dessus. Ce qui me manque le plus… Tout en fait. Le contact, mes amis, avoir une maison… J’ai l’impression de ne même plus être humain.

Je termine de manger et de boire et soupire doucement. Tout ça m’a fait beaucoup de bien. Mais il va falloir que je me fasse à l’idée que je vais devoir retourner à la rue très vite.

- Merci beaucoup pour tout ce que tu m’as offert Dolores. Je ne sais pas comment te remercier… mais je n’oublierais pas.

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Ça ne devait pas être facile pour Andy de payer les frasques de son père. Au final, lui n'avait rien demandé et Dolores comprenait assez mal pourquoi il n'avaient plus rien. S'il avait travaillé, il devait bien avoir de l'argent de côté non ? Mais peut être qu'on lui avait pris aussi son argent personnel. Le jeune homme s'était retrouvé avec juste sa guitare et ses vêtements, à la rue. Au fond, Dolores ne savait ce qui était pire. Avoir eu la belle vie pendant plusieurs années et ne plus rien avoir désormais ou n'avoir jamais rien eu et ne pas arriver à avoir ce qu'on veut. Les deux cas étaient trop différents pour être comparés. Andy n'avait pas eu de chance à cause de son père et Dolores comprenait même qu'il puisse lui en vouloir. Mais rien ne présageait une telle chose. Andy ne semblait pas savoir où se situer dans cette histoire. Dolores tentait d'être gentille, elle pouvait comprendre que ça faisait longtemps qu'il n'avait pas profité d'un bon repas. Aussi, il avait si vite terminé son assiette qu'elle lui en resservit une immédiatement. Une moue songeuse s'afficha sur le visage de la jeune femme.

« Si t'es pas trop regardant sur le boulot à faire, je peux voir autour de moi. Mais c'est clair que ce sera pas le boulot de rêve... »

La jeune femme attrapa un bloc-note et un stylo et inscrivit son numéro sur une feuille avant de la donner à Andy. Si jamais il avait besoin d'elle, il saurait comment la contacter maintenant. Après tout, si elle pouvait l'aider, elle n'allait pas s'en priver. Après tout, là où elle bossait, on ne se souciait pas réellement du passé des gens tant qu'ils faisaient leur boulot correctement. Un léger sourire se dessina sur le visage de la brune.

« Si elles avaient pris le temps de t'offrir une douche et un repas, peut être qu'elles auraient vu combien t'es intéressant. Et je parle pas que physiquement... » Elle soupira doucement. « C'est le problème de notre monde. Il n'y a plus vraiment d'humanité... »

Andy avait fini de manger et semblait vouloir partir. Dolores l'observa un court instant avant de sourire doucement. Elle lui tapota l'épaule avant de se lever, récupérant la vaisselle. Elle s'alluma une cigarette, en proposant une à Andy avant de s'échapper dans sa chambre. Elle revint peu après avec un oreiller et une couverture un peu déchirée.

« Désolée, elle est un peu vieille. Le canapé est un peu petit mais tu devrais bien dormir quand même. Et t'as pas à me remercier. Mais si un jour tu récupères ta fortune, pense à moi hein... »

La brune plaisantait, elle n'était pas le genre de personne à être intéressée par les choses matérielles. Sinon, elle ne vivrait pas dans ce genre d'appartement.

» Parfois on se dispute, on s’arrache le cœur. Mais finalement est-ce anormal entre frère et sœur ? - ft. Andy L. Connor
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